Regarder en arrière

“Voilà, c’est ici ! — Quoi ? Quelle barraque ? — Celle-ci.”, dit-il, levant la main vers une maison proprette au crépis immaculé, aux lasures irréprochables et au jardin taillé et ordonné comme la chambre d’un enfant modèle. — “Wow ! Je ne sais pas lequel de tes parents s’en charge, mais manifestement, il ou elle, s’occupe bien de la maison. Je comprends que tu aies voulu repasser ici, c’est classe. Bon c’est sûr, c’est un peu trop Brie Van de Kamp à mon goût, mais … — Ah c’est bon ! Ferme la, tu veux ? — Ok. Ok, mon pote. Et maintenant. On fait quoi ?”

Son interlocuteur était déjà parti s’asseoir de l’autre côté de la rue. Shane alla le rejoindre en cherchant les mots qui engageraient enfin une conversation constructive entre eux. Jusque là, il n’avait pas été brillant dans ce domaine.

Il s’affala sur le trottoir à un mètre de son compagnon. “Bon, maintenant qu’on est là, on va pouvoir se parler un peu...” L’autre restait les yeux rivés sur la maison de ses parents, son visage ne trahissait aucune émotion. “On a marché toute la journée pour arriver là. Un jour entier que je te parle et que tu ne me réponds pas, que je te demande ton prénom et que tu ne me dis rien. — …” Il s’approcha légèrement de lui. — “Ecoute fils, je sais pourquoi tu es venu. Je sais que tu penses en avoir besoin, mais c’est une idée à la con. Crois-m... — Je ne suis pas ton fils, ou ton pote, ou ce que tu veux.” Une lueur de rage passa dans ses yeux. … “Des plombes que tu me rabâches ça. Fous-moi la paix et casse-toi ! ”

Il tenta de se lever mais resta cloué au sol par la main de son détracteur. Putain, quelle poigne !

“Je t’ai déjà expliqué que c’était hors de question. Mon boss m’a dit : Si tu veux qu’il rejoigne nos rangs, tu te démerdes avec. Donc voilà, je me démerde avec... — Mais pourquoi putain ! Pourquoi tu ne les as pas laissé me régler mon compte ? — Parce que... il hésita un moment. Quand je suis arrivé dans cette salle de cours, je t’ai vu. Cerné par mes gars, tu arrivais à les tenir à distance à coup de crosse de fusil. Tu savais que tout était perdu. Tu savais que quasiment tous tes potes étaient morts. Et pourtant, tu te battais comme un lion. J’aime ça. Alors je t’ai voulu avec nous. — Mais c’est pas possible !” sa voix mourut dans un souffle. “C’est pas possible …” — Vous avez été braves mon pote. Héroïques même. Jamais je n’aurais cru que vous tiendriez plus d’une journée, et pourtant vous l’avez fait. Mais voilà ! Même si tous tes potes avaient eu la même combativité que toi, vous restiez une petite milice et nous une armée. Ce qui est arrivé était inévitable.”

Il laissa à son compagnon le temps de respirer un peu. Il s’était pris la tête entre les mains, le déni faisant visiblement place au désespoir. La rue était calme, déserte, sans bruit. Seul le souffle du vent dans les branches venait couper l’ambiance monotone du petit lotissement de banlieue. Un volet claqua dans leur dos et seul Shane se retourna, adressant à l’habitant un grand salut de la main qui provoqua un cri étouffé derrière le rideau de bois. Un sourire démoniaque se dessina sur le visage de Shane.

“ Eric. Je m’appelle Eric.” Le sourire mesquin se mua en un O de surprise, puis Shane reprit, ne voulant pas laisser passer l’occasion : “ Ricky ! Ma foi, ça te va bien comme nom. En tout cas, je suis content que tu t’ouvres enfin un peu mon vieux ... — Comme veux-tu que j’accepte tout ça ? ” Shane le prit par l’épaule. “ Je sais que ça te parait impossible. Mais j’ai vu dans tes yeux que tu ne voulais pas que tout s’arrête ce soir là. Je l’ai su dès que nos regards se sont croisés. Ça prendra peut-être un peu de temps, mais tu t’y feras. Crois-moi ! J’ai été comme toi tu sais ? Je n’ai pas toujours fait parti de... tout ça. Mais sérieux mon pote, avec du recul, je crois que c’est le truc le plus dingue que j’ai jamais fait. On change le monde Ricky... on change le monde. — C’est des conneries tout ça !” Il fit un mouvement d’épaule pour voir si cette fois, il pourrait se lever, et Shane le laissa faire. “Tu as fais partie d’une milice Eric. Tu as connu la guerre. Tu as vu tous tes amis mourir. Et maintenant tu es avec nous. Nous... Nous sommes ta famille ! Quoi que tu penses trouver derrière cette porte, tu te plantes lourdement. Tout ça t’a changé Ricky. Ils ne t’accepteront pas et toi non plus, tu verras. — J’ai... J’ai le droit de tenter ma chance. Ça n’engage à rien. Et je ne veux pas croire qu’ils me rejetteront. — Fais comme tu veux. Mais ne viens pas te plaindre des conséquences.”

Shane se leva à son tour et s’étira, scrutant les différentes possibilités qui s’offraient à lui. “ Ne met pas trois plombes mon pote, il faut qu’on rejoigne le reste de la troupe. En t’attendant, je vais voir si je peux trouver quelque chose à grailler dans une de ces baraques.”

Deux mois plus tôt, le maire de la ville avait annoncé que l’armée – cette bande de chiens galeux au service d’un gouvernement gaucho pourri selon ses termes – établissait une ligne de défense à cent kilomètres en amont du conflit et que tous ceux qui se trouvaient au-delà devaient se replier. Abandonner sa maison, ses souvenirs, sa ville, pour une issue qui serait sans doute la même tant l’armée semblait sans solution. C’est à la fin de ce discours et pour protéger tous ceux qui lui restait que Shane avait décidé de rejoindre la milice naissante. Les semaines suivantes n’avaient été qu’un enchaînement d'entraînements aux tirs et d’apprentissage de l’élaboration de pièges, dirigés de main de fer par les chasseurs locaux. Chaque jour il recevait une lettre de Margareth, sa petite sœur, lui disant qu’elle était fière et comme il lui manquait. Ses lettres lui remémoraient les nombreuses années passées ensemble où ils avaient été si proches. Toutes ces fois où il la protégeait dans la cour de l’école; où, à la lueur d’une lampe torche sous une tente improvisée d’une couette et un bâton, ils tentaient de faire sortir les esprits d’une table de ouija; la fois où il l’avait consolé quand son premier petit ami l’avait larguée pour se mettre avec Bettsy Patterson parce que cette garce n’avait pas d’appareil dentaire. Meth, seul Eric l’appelait ainsi, lui manquait aussi.

Eric n’avait pas entendu les dernières remarques de son compagnon tant il était concentré sur la porte qui l’attendait de l’autre côté de la ruelle. Les quelques mètres qui le séparaient de sa famille lui paraissaient interminables, traînant les pieds comme si sa peur prenait le pas sur son envie de les revoir.

Après avoir fait deux fois le tour de la maison en quête d’une présence ou d’un accès facile, il revint sous l’auvent de l’entrée et toqua à la porte.

“ Y a quelqu’un ? Ouvrez ! C’est Eric. C’est moi !”

Il crut entendre d’imperceptibles bruits de glissement, comme si quelqu’un s’appliquait à se déplacer en silence. Guidé par une impatience dont il ignorait jusque là l’existence, il tambourina à la porte puis se jeta dessus en criant son nom.

“ERIC ! Putain c’est Eric. Ouvrez-moi bordel ! Qu’est-ce qui vous prend. OUVREZ !” Vous n’imaginez pas ce que j’ai traversé pour vous revoir. Ouvrez-moi bordel. Acceptez-moi !

Sa température corporelle montait en flèche. Tout bouillait en lui et ça n’arrangeait pas la migraine qu’il sentait arriver. Dans un cri d’agonie interminable, il se frappa les tempes des deux poings et ferma les yeux pour trouver un peu de paix.

Quand il reprit conscience, il était couché sur le sol du patio de ses parents, couvert des débris de la fenêtre qu’il venait de traverser. Que... Qu’est-ce que j’ai fait ? Doucement, il se releva prenant d’abord appui sur son genou, puis sur le mobilier de jardin qui avait, un jour, accueilli ses jeux d’enfants.

“... Quelqu’un ? Je suis désolé pour la baie vitrée. Je ne voulais pas...” Je ne sais pas ce qui m’a pris. La maison était entièrement silencieuse. Peut-être s’était-il trompé ? Peut-être que son père avait fait ce qui était le plus raisonnable : abandonner son fils et fuir.

Recouvrant peu à peu son équilibre, Eric s’avança dans la maison, pour s’assurer que sa famille était au loin, en sécurité. Si la journée pendant laquelle la milice avait tenu, leur avait au moins permis de fuir, il n’aurait pas livré ce combat en vain. Alors qu’il montait à l’étage, Eric entendit un tintement métallique résonner dans l’établi, au sous-sol. Un étage plus bas, le coude de Meth venait de faire tomber une clef à pipe sur la boite à outils de son père.

Eric ouvrit délicatement la porte sous l’escalier et entendit quelques chuchotements venir de la cave sans pour autant pouvoir distinguer ce qui se disait. Les lumières étaient éteintes mais il n’en avait cure, tant il avait foulé les marches de ces escaliers pour aller aider son père à bricoler. Le bois usé par l’humidité grinçait de douleur à chacun de ses pas. Lorsqu’il arriva enfin sur la dalle de béton, il se tourna vers le point d’origine des respirations qu’il entendait depuis un moment. Malgré la faible lueur délivrée par la fenêtre de garage, il distinguait sans problème son père, sa mère et sa soeur, tapis dans un coin de la pièce. Sa mère mit quelques secondes à le reconnaître, mais dès qu’un rai de lumière croisa le regard de son fils, elle se mit à hurler et à pleurer. Eric sentit un poids sur son coeur, mais aucune larme ne lui vint. Il s’approcha doucement de sa famille.

“Meth... Papa, Maman, vous êtes sains et saufs. Je suis rassuré. Si vous saviez tout ce que j’ai vu.” Il courait maintenant, ouvrant les bras pour les serrer aussi fort qu’il le pourrait. Il n’était plus qu’à cinq mètres. “Vous m’avez tellement manqué.” Trois mètres. Un mètre. Soudain son père lui décrocha la mâchoire d’un coup du manche de la pelle qu’il avait en main. Eric vola sur deux mètres et finit sa course dans un empilement de carton. Que... C’est quoi ce bordel. “PAPA !”

Alors qu’il se relevait péniblement, Eric prit conscience que la réaction de son père lui avait causé un terrible choc, pas tant le coup en lui même que ce qu’il impliquait. Sa mère était maintenant recroquevillée, la tête entre les genoux, à pleurer tout son soûl. Son mari, penché sur elle, lui hurlait dessus, désignant leur fils du bout de la pelle pour souligner quelques menaces. La cadette, stoïque, restait droite comme un I, bien sage, dans son coin, à regarder la scène comme si c’était un film à la télévision. Eric voyait les lèvres de son père remuer, il entendait clairement qu’il parlait, mais il était incapable de comprendre le langage qu’il employait. C’est quoi ce bordel ! Et si... Et s’ils ne me comprenaient pas non plus ?

Écartant les derniers cartons qui lui barrait la route, Eric s'avança vers son père, plus prudemment que la fois précédente.

“Pourquoi t’as fait ça Papa ? Pourquoi ? C’est moi putain ! Ton fils. Eric !”

Regardant une dernière fois sa femme et sa fille, son père s’élança en poussant un cri de guerre, la pelle relevée, prête à frapper. Sa femme cria à nouveau, tendant une main fébrile pour sauver son mari du destin qui l’attendait.

Eric sentit à nouveau une rage incommensurable l’envahir. Ses muscles se tendirent au maximum. Ses pupilles se dilatèrent au point de recouvrir toute la surface visible de l’oeil. Il voyait maintenant un homme courir vers lui, au ralenti, une bêche à la main, avec une furieuse envie d’en découdre. Ça tombait très bien, il n’attendait que ça, armé de sa colère, de toute sa hargne, il n’était plus que haine. Saisissant l’homme au bras et à la nuque, il pivota sur sa hanche gauche pour l’envoyer finir sa course sous la cage d’escalier, la tête la première. Accompagnant son assaillant jusqu’à la dernière seconde, il sentit les vibrations dans sa main lorsque le crâne qu’elle tenait, s’enfonça profondément dans le bois de la marche. Il sentit les pulsations du coeur de la victime se ralentir rapidement pour devenir infimes, puis s’arrêter. La sensation que chaque battement pouvait être le dernier excitait Eric comme il ne l’avait jamais été. Il lâcha le cadavre qui s’écrasa au sol dans un bruit lugubre de viande morte. Derrière lui, Eric entendit un hurlement et des bruits de pas courant en tout sens. Mais tout ça n’avait aucun importance. Devant ce corps inerte qui gisait devant lui, il sentit une nouvelle sensation l’envahir. La bave commençait à s’accumuler autour de ses lèvres alors que ses mains, avides, déchiraient les chairs en quête des entrailles qu’il désirait tant. Il entendit un choc sourd et fut propulsé sur le côté par un objet qui venait de lui perforer le ventre sur une dizaine de centimètres.

Le coup lui avait remis les idées en place, et une consciente terreur l’envahit quand il comprit la situation. Sa mère qui l’avait nourrit au sein si longtemps. Sa mère qui avait tenu sa selle le jour où il avait voulu enlever les roulettes de son vélo dans le parc aux grilles bleues à côté de chez eux. Sa mère qui avait fait le forcing auprès de son père, pour qu’il puisse rentrer à minuit la première fois où il avait invité Jenny Lemont à aller au cinéma. Sa mère qui cumulait un emploi et sa vie de femme au foyer en étant irréprochable dans chacun des deux domaines. Sa mère qui était certainement la femme qu’il admirait le plus au monde, venait de lui arracher une bonne partie du ventre avec la pioche qu’elle tenait toujours fermement. Alors qu’Eric se relevait, sa mère tomba à genoux en reddition, son arme glissa au sol alors qu’elle se prenait la tête entre les mains pour couvrir ses pleurs.

Le funeste compagnon d’Eric, empli de colère, de haine et d’une insatiable faim avait disparu. Il était conscient que cette chose qui avait pris possession de son corps était ce qu’il était dorénavant et que la meilleure chose à faire était d’embrasser son destin. Il n’était plus habité lorsqu’il prit sa mère dans ses bras et qu’il arracha le cou de sa génitrice à grands et violents coups de mâchoires, retenant le corps qui gigotait en tout sens de ses mains rugueuses. Cette chose, le nouveau Eric, trouvait la viande particulièrement tendre et sucrée. Délicieux.

Alors qu’il se délectait comme jamais auparavant, Eric sentit des mains parcourir son dos. Il se retourna vivement prêt à bondir et Meth le prit dans ses bras, pleurant à chaudes larmes, un sourire aux lèvres, quel que soit son état, elle avait enfin retrouvé son frère.

Le soleil était levé sur le parc à grilles bleues depuis quelques heures et Shane, assis sous l'auvent de l'homme aux volets qui claquent, regardait avec dégoût une grand mère installée sur un banc, un teckel aux yeux exorbités sur les genoux, qui caressait son fidèle compagnon avec une extrême application. Elle n'avait pas remarqué Shane, trop concentrée sur sa tâche et sans doute victime de myopie, de presbytie ou d'une autre maladie en “ie” qu'on ne vous diagnostique qu'en prenant rendez-vous un an plus tôt. Shane aurait pu aller la voir mais la petite sauterie de la veille l'avait épuisé. Deux adultes et un bébé, c'était peut-être trop pour lui seul. J'suis trop vieux pour ces conneries. L'évocation d'une réplique de l'arme fatale lui arracha un sourire nostalgique.

La porte de la maison d'Éric grinça, le tirant de ses songes mélancoliques. Shane alla à sa rencontre aussi vite qu'il put, en boitant.

“ Ricky. Mon Ricky. J'ai entendu des cris hier soir. Je ne te demande pas si ça s'est bien passé ? — Ça s'est... passé. T’es blessé ? — Oh ça ? Un coup de hache, trois fois rien. Mais on s’en fout. Tu veux en parler ? — Non. Je... Ça va en fait. Je crois que j'ai compris ce que je suis. J'ai... J'ai pas le choix en même temps. Si ? — Non effectivement. Comment te sens-tu ? Comment ça s’est passé ?” Eric poussa un soupir, prit une longue inspiration et se lança : “ Mon père m'a agressé et j’ai ressenti comme une immense colère... Poussé par une irrépressible faim, je suis entré en transe, cherchant machinalement ses intestins. C'est cet instant que ma mère a choisi pour m’asséner un coup de pioche.” Il désigna un trou au dessus de sa hanche droite. “ Ah ouais, il me semblait bien que tu avais une petite poignée d'amour à cet endroit.” Eric le regardait, les yeux désabusés, un sourire en coin greffé sur le visage. “ Ok. Pardon mon pote. Continue. — En me relevant j'ai vu celle qui était ma mère d'un autre œil. Elle m'avait abandonné et, inconsciemment, j'avais fait de même. Je n'avais plus aucun sentiment pour elle. Elle n'était plus qu'un sac de viande mouvant. C’est ça : une vivante bientôt morte.”

Shane resta coi devant la lucidité de son compagnon. Un zombie si jeune. Il ne s'était pas trompé, Eric était une recrue de premier choix.

“ Mon premier meurtre en étant... Moi... était ma mère. — Wow mec, je ne m'attendais pas à ça quand même. Et, pardon d'être direct ...” Eric sourit de cette formulation qui, de la part de Shane, était plus qu’incongrue “... tu les as bouffé à deux tout seul ? En général les premiers repas sont un peu chaotiques et on a tendance à gerber partout. — En fait, à ce moment là, ma sœur m’a pris dans ses bras. — Quoi ? Tu déconnes ! Tu t’es bouffé trois personnes ? Ma parole, mais tu as du repeindre la baraque. — En fait, je dois te dire quelque chose.

Eric se tourna vers la porte d’entrée où une fille d’une quinzaine d’années attendait sagement qu’on s’adresse à elle. Les yeux d’un bleu presque transparent, un nez en trompette posé sur de petites lèvres charnues, maquillées du même sang qui couvraient la partie supérieure de sa robe, elle dégagea ses dents brunâtres dans un sourire qui aurait ramené le plus dur des hommes à l’état d’énurétique chronique.

“ Je te présente ma soeur. Margareth. Meth, dit bonjour. — Attends, tu déconnes mec ? C’est quoi ça ? C’est quoi ce bordel ? — Margareth, enchantée” dit-elle, tendant la main à Shane qui la serra incrédule. — Ta soeur ? Ta soeur ! Putain mais le boss va me démonter. Pourquoi t’as fait ça ? Non, là t’a chier mec. On n’a pas le droit d’enfanter comme ça.” Il observa la jeune fille des pieds à la tête puis reprit en soupirant : “Bon ! Laissez tomber pour le moment. Il faut qu’on y aille.”

Sans attendre ses deux compagnons, il prit la route qui les avait amené dans cette petite banlieue proprette. Ils passèrent devant l'aïeule et son chien et Shane en profita pour laisser place à sa colère : “Mamie ! On ne joue pas avec la nourriture”. Ils tournèrent finalement au coin de la rue.

Assise confortablement sur son banc, ses jambes trop courtes pendant dans le vide, la grand-mère à robe jaune plantait ses dents élimées dans une aisselle de son teckel, là où la chair était la plus tendre.