Carte bancaires : transformer les données des transactions bancaires en actifs à haute valeur ajoutée

Les paiements par carte bancaire et maintenant par smartphone simplifient le quotidien et se traduisent par une expérience utilisateur améliorée. Cependant, le revers de la médaille – ou plutôt de la pièce – c'est que ces transactions représentent une source d'informations qui trahissent nos comportements d'achats et donc une menace pour notre vie privée.

Les cartes de crédit sont porteuses de nombreuses informations sur les individus. Celles-ci sont utilisées par les commerçants pour améliorer leurs offres, mais elles sont également réassemblées et vendues sur à des acteurs tiers sur le marché des données publicitaires.

L'idée de pouvoir collecter des informations et établir un lien entre les différents achats d'un consommateur n'est pas nouvelle. Dès le début de la seconde moitié du 20ème siècle des initiatives émergent. Mais il manque une infrastructure informatique pour permettre de généraliser la collecte de données liées à des achats.

Ce n’est qu’à partir des années 70, avec l’essor de l’informatique et sous la contrainte des évolutions règlementaires (visant à davantage de transparence), que vont être constituées les premières bases de données conservant un historique standardisé des transactions pour chaque individu listant la date, le montant, le lieu et une brève description de chacune.

A partir des années 80, la démarche s'industrialise. La collecte de données transactions bancaires est devenu un secteur structuré avec des acteurs majeurs comme American Express. Des partenariats entre différents activités et des réseaux bancaires se nouent : hôtels, compagnies aériennes, entreprises automobiles...

Cet attrait pour les données transactionnelles conduit de nombreuses entreprises à proposer des cartes co-brandées à l’instar du partenariat pionnier, en 1987, entre CitiBank et American Airlines. Pour les compagnies aériennes, hôtels, fabricants automobiles et autres commerçants, ces partenariats leur donnent accès à de précieuses données sur les transactions réalisées par leurs clients.

Ce développement permet de démontrer les limites de l'interprétation du développement du capitalisme de surveillance selon Shoshana Zuboff. D'après la chercheuse, le capitalisme de surveillance serait une évolution du capitalisme qui est apparue au début des années 2000 avec des entreprises comme Google qui constituent leur modèle économique sur la collecte de données personnelles des utilisateurs. Cependant, l'analyse du développement de l'industrie des cartes de crédit démontre que le capitalisme de surveillance n'est pas si récent et qu'il est lié à l'accroissement de l'informatique dans les entreprises dès les années 60 afin de permettre une amélioration et une optimisation de la production. Les industriels détenaient une somme d'informations qu'ils n'étaient pas capables d'exploiter.

Ce que nous considérions comme une industrie était un grand nombre d'informations collectées, mais personne ne savait vraiment comment les utiliser

C'est ce qu'explique plus en profondeur Christophe Masutti dans son livre Affaires privées, aux sources du capitalisme de surveillance, publié chez C&F éditions. Pour résumer, l'industrie a eu besoin d'optimiser sa production en réduisant les coûts, l'informatique a accompagné ce processus. Les GAFAM et toutes les sociétés de la SurveillanceTech n'en sont que les héritiers.

La prochaine fois que vous serez chez un commerçant, payez en liquide ! ;–)

#Tracking #Banque


Source : Linc