“Ce n'est pas un échec, ça n'a pas marché”.

Le président Emmanuel Macron a annoncé, lors de son interview de mercredi soir, la sortie d'une nouvelle application baptisée Tous Anti-Covid. Cette nouvelle mouture de l'application de contact tracing remplacera sa grande soeur StopCovid. D'après les mots du chef de l'Etat, StopCovid “n'est pas un échec, ça n'a pas fonctionné”. Cette figure de style, propre aux personnalités politiques, dite de la langue de bois est une pirouette digne de Big Brother :

"La guerre, c'est la paix. La liberté, c'est l'esclavage. La connaissance, c'est l'ignorance. La réussite, c'est l'échec."

Orwell vient d'ailleurs d'entrer dans la prestigieuse Pléiade. Coïncidence ? Je ne crois pas.

La fuite en avant technologique

La France, à l'instar de ses partenaires européens, a fait le choix de développer une application pour automatiser les procédures de contact tracing. Les résultats parlent d'eux-mêmes, StopCovid est un échec qui a coûté un pognon de dingue”. Au-delà des débats sur l'effet cliquet d'une politique sanitaire qui habitue la population à des solutions technologiques pour résoudre un problème, l'annonce de Tous Anti-Covid révèle l'incapacité des pouvoirs publics à tirer une leçon de leurs échecs.

En effet, une des critiques de StopCovid était le caractère excluant de ce dispositif. 20% de la population française est en situation de fracture numérique. Cette frange de la population ne dispose pas du matériel permettant d'utiliser cette appli ou n'est pas en capacité de savoir télécharger une application ou d'activer le bluetooth sur son appareil. A partir du 22 octobre, une autre application sera disponible mais qu'en est-il de ces 20% en situation de précarité numérique ? D'autant plus qu'une partie est issue de milieux défavorisés et des quartiers populaires particulièrement exposés au virus en raison de la surpopulation, de la concentration de personnes dans des logements exiguës et de la saturation des établissements de santé. Sans compter que ce sont eux qui occupent généralement des métiers où le télétravail n'existe pas.

Une des causes de l'échec de StopCovid réside dans le choix de l'architecture de l'appli. En effet, la France a voulu privilégier la souveraineté numérique (à géométrie variable) en refusant d'adopter un protocole décentralisé. Ce choix a conduit la France à s'isoler de ses partenaires européens qui ont pu mettre en place une interopérabilité des applis de contact tracing. Tous Anti-Covid reposera-t-elle sur une architecture centralisée ?

La seconde mouture devrait disposer de nouvelles fonctionnalités :

“Mais, a précisé Emmanuel Macron, il s’agira surtout d’une « application d’information », prévenant les utilisateurs de « la circulation du virus, des points pour se faire tester, etc.”

L'Etat est à deux doigts d'inventer le principe du point hebdomadaire d'Olivier Véran. Si une zone est décrétée être en alerte maximale, on se doute que la circulation du virus est importante et par conséquent que le respect des gestes barrières est d'autant plus nécessaire. Penser que les gens vont télécharger l'application pour être informé de la circulation du virus, c'est d'une part considérer qu'ils ne sont pas capables de s'informer, et d'autre par, c'est mépriser le travail des journalistes qui passent leur temps à produire des articles et des dispositifs de data-visualisation de la situation.

Enfin l'amateurisme éclairé des pouvoirs publics se mesure à travers leur organisation et leur manque d'anticipation. L'Etat a enregistré le nom de domaine tousanticovid.fr. Ça évitera le cybersquatting mais en regardant le WHOIS du domaine, on s'aperçoit que le nom de domaine a été enregistré le matin de l'allocution du Président.

Rendez-vous le 22 octobre et en attendant respectons les gestes barrières !

#Covid #StopCovid #ContactTracing