King-Kong Théorie (Virginie Despentes)

En tant qu’homosexuel et porteur d’un handicap physique, je suis sensibilisé aux questions de domination, d’oppression et de lutte des minorités. Pourtant, le féminisme a longtemps été un angle mort de mon rapport au politique : il m’a fallu quelques lectures et écoutes pour ouvrir les yeux, pour commencer à m’y intéresser et surtout à comprendre que ces questions ne sont pas accessoires, que la lutte contre la domination masculine est indissociable de la lutte contre la domination capitaliste.

Depuis, je cherche à m’éduquer, à me renseigner et à me documenter à ce sujet. C’est ainsi que j’ai commencé il y a quelques semaines à écouter Les couilles sur la table, un podcast créé et animé par Victoire Tuaillon où la journaliste aborde la construction des masculinités d’un point de vue féministe. À l’occasion d’une série de 4 épisodes, elle a reçu et interviewé Virginie Despentes, que je connaissais que « de loin » et que j’ai pu réellement découvrir à cette occasion.

J’avais sans doute déjà vu ou entendu l’autrice et réalisatrice dans des émissions de télévision ou de radio, je connaissais son engagement politique et féministe, j’avais constaté le succès de sa série de romans « Vernon Subutex » que je voyais beaucoup dans les transports en commun à une époque, mais je n’avais jamais lu ses livres ni vu ses films. Dans le podcast, elle parlait notamment de son essai féministe King Kong Théorie publié en 2006, dont j’avais déjà entendu beaucoup de bien. Cette fois, je me suis dit que c’était le moment de combler cette lacune.

Dès les premiers pages, dès les premières lignes, le constat est frappant : c’est une écriture coup de poing, presque orale mais que l’on devine travaillée. Il faut du talent pour poser sur le papier des phrases aussi fluides et puissantes. Sans vouloir tomber dans le cliché, on sent que c’est un texte qui vient des tripes.

En 160 pages, Virginie Despentes nous parle de féminité et dénonce la place respective des femmes et des hommes dans notre société. Les chapitres sont courts et vont à l’essentiel :

  1. Bad Lieutenantes : prologue, où l’autrice se place du côté des « moches », des « exclues du marché de la bonne meuf » tout en fustigeant l’idéal de la femme blanche et convenable véhiculé par l’art et la culture
  2. Je t'encule ou tu m'encules ? : révolution sexuelle des années 1970 mais sans remise en cause de la répartition des tâches domestiques et plus globalement des rapports de force entre hommes et femmes dans la société
  3. Impossible de violer cette femme pleine de vice : le viol
  4. Coucher avec l'ennemi : la prostitution
  5. Porno Sorcières : le porno
  6. King Kong Girl : la féminité et la domination masculine, les rapports de classe
  7. Salut les filles : épilogue, où Virginie Despentes appelle à accompagner la révolution féministe d’une véritable émancipation masculine ; elle nous invite, en tant qu’hommes, à avoir le courage de nous libérer du carcan masculiniste et viriliste

Je débarque évidemment après toutes celles et tous ceux qui ont lu ce livre depuis sa sortie, bien avant moi. Si vous ne l’avez pas déjà lu, je ne peux que vous inviter à le faire, que vous soyez un homme ou une femme, et peut-être plus encore si vous êtes un homme.

Zéro Janvier@zerojanvier@diaspodon.fr

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