Un nanar là où on ne l’attend pas

Critique d’Immortality (Sam Barlow, 2022)

Capture d’écran du clip de « Best In The Class » par Late Of The Pier

En lançant Immortality, mon premier Sam Barlow, et mon premier jeu-avec-des-vidéos (ou “FMV” mais c’est naze comme appellation) depuis la fois où j’avais lancé Night Trap (Digital Pictures, 1992) pour rigoler, et en sachant d’avance que le contenu du jeu était Trop Chaud Pour Le Streaming, je m’étais attendu à du nanar. Y'a un moine-Jésus sexy qui veut baiser, un détective qui enquête en soirées Andy Warhol, une chanteuse en crop top de la fin des 90s, des plans nichons à foison, le tout enrobé de paranormal, avec ça il y aurait de quoi rire n’est-ce pas ? Mais il s’avère que Barlow sait mieux tenir une caméra que les réals de Night Trap, et le résultat ressemble plutôt à des tranches de vie sur des tournages, avec des acteurs et des techniciens qui flirtent, qui s’engueulent, qui s’affairent, qui réfléchissent, dans une plus ou moins franche camaraderie. Je m’attendais à de la série Z, je me retrouve avec La nuit américaine. N’importe quel autre AAA (sauf les Naughty Dog bien entendu) aurait eu des cinématiques plus cons ; c’est peut-être pour ça qu’Edge lui a mis 10/10.

Mais ce n’est pas parce que les cinématiques, quand bien même font-elles la quasi-totalité de ce qu’on voit dans ce jeu, sont faites avec goût qu’Immortality est immunisé contre le ridicule. Pour moi, l’humour involontaire a surgi de ses deux principales mécaniques, à savoir mettre la vidéo en pause pour cliquer sur des objets, et (attention c’est là que je divulgâche) passer la vidéo en marche arrière chaque fois que la manette vibre.

Cette deuxième mécanique, expliquée nulle part, fait office de surprise macabre : ces vidéos sont hantées ! Puis dès qu’on a capté le truc et qu’on rembobine à chaque vibration, on se rend compte qu’une fois sur deux, la « surprise macabre », c’est le Fantôme de la Moviola en train de rouler une pelle/simuler le sexe avec quelqu’un qui semble ne pas se rendre compte de sa présence, avant de nous faire un regard caméra complice, en mode hihihi, je hante les films pour pécho leurs acteurs 😈. Vous me direz alors : arrête de te moquer, c’est probablement expliqué dans le scénar. Probablement ! Le souci c’est que pour le voir, ce scénar, il faut passer par la première mécanique, celle où il faut cliquer sur des objets pour être redirigé vers une vidéo au hasard, y compris une déjà débloquée. Finir Immortality, en tout cas débloquer suffisamment de vidéos pour comprendre ce qui s’y passe, consiste donc à bourriner n’importe quel truc un peu insolite sur lequel la caméra va parfois s’attarder sans subtilité, jusqu’à enfin tomber sur une vidéo inédite. Steam donne un succès à chaque fois qu’on trouve la totalité des vidéos de chaque tournage, et après 20h à cliquer partout comme un couillon je n’en ai eu aucun. Désolé Sam Barlow, je publie cette critique et après je vais lire la fin de ton jeu sur un wiki.