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La galÚre du choix des speakers pour une conférence

đŸ‡«đŸ‡· – mardi 4 juin 2019

Mots clés : #DevFest, #CFP, #CallForPapers, #conferences, #meetups

AprĂšs avoir organisĂ© la 1Ăšre Ă©dition du DevFest du Bout du Monde avec Code d’Armor (le GDG des CĂŽtes d’Armor) et les copains du FinistDevs (celui du FinistĂšre), j’ai dĂ©cidĂ© d’aborder le dur choix de la sĂ©lection des intervenants pour une confĂ©rence, car plusieurs façons de voir les choses s’opposent, les polĂ©miques se rĂ©pĂštent, et aucune solution n’est vraiment meilleure que l’autre


âžĄïž Savoir se lancer, et minimiser les risques

Je prends exemple ici du DevFest du Bout du Monde mĂȘme si finalement on retrouve cette problĂ©matique partout. Lorsque l’on dĂ©cide de crĂ©er la 1Ăšre Ă©dition d’une confĂ©rence, en plus de tout le travail de lancement du projet, on doit faire le choix des personnes qui interviennent pour des confĂ©rences, quickies ou ateliers, et un outil de Call For Paper (comme Conference Hall) fait gĂ©nĂ©ralement grandement l’affaire. Chaque organisateur vote mais se pose souvent les mĂȘme questions que ses collĂšgues : quelle stratĂ©gie adopter ? qu’est-ce qui ferait consensus ?

On pourrait miser sur les gros poissons, et dans l’IT ce n’est pas ce qui manque. En 2019 une entreprise du secteur qui n’a pas de Dev Rel / Dev Advocate / Dev Evangelist / Dev {insĂ©rez un titre qui claque ici} n’a pas tout compris Ă  la culture software. DerriĂšre ces candidats-lĂ  ce sont des entreprises qui rĂ©munĂšrent les intervenants et qui sont objectivĂ©s Ă  faire des tournĂ©es un peu partout pour partager voire Ă©vangĂ©liser sur un sujet, une techno ou sur le fait que c’est l’entreprise que-c’est-elle-la-meilleure-avec-des-paillettes. Et parfois on peut se retrouver avec ces rockstar speakers Ă  participer Ă  leurs tournĂ©es comme si on Ă©tait leur roadies en leur prĂ©parant la scĂšne et avoir la chance insigne de les avoir. Dans les faits le contenu proposĂ© par les intervenants est rĂŽdĂ© dans une majoritĂ© des cas, et il n’y a pas de regret Ă  avoir quand Ă  leurs prestations (ouf !). Mais parfois, on se dit qu’avoir telle ou telle entreprise reprĂ©sentĂ©e dans les confĂ©rences peut ramener davantage de monde et faire gagner l’évĂ©nement en visibilitĂ© (et en r€cettes) ; on peut ĂȘtre amenĂ© Ă  faire le choix de simplement profiter de son aura sans s’assurer d’avoir quelque chose de qualitatif derriĂšre. C’est con, mais pour se lancer on doit prendre des dĂ©cisions et ne pas faire des paris trop risquĂ©s pour assurer la viabilitĂ© du projet. Quitte Ă  avoir Jean-Rufus qui (re)parle encore dans un grand slideshow du fonctionnement du nouveau BullShitLayout proposĂ© dans la prĂ©-alpha-release d’une lib.

âžĄïž Savoir se lancer, mais miser sur le local

On peut aussi faire le choix du local pur-terroir-certifiĂ©-bien-de-chez-nous-100%-green. L’intĂ©rĂȘt ici est de mettre en avant des p’tits nouveaux, de chercher des talents ou des intervenant.e.s qui ont du potentiel et de construire l’aventure avec elles et eux.

Cette façon de faire a un bel avantage qui est celui de donner une identitĂ© rĂ©gionale Ă  l’évĂ©nement avec des thĂ©matiques pas forcĂ©ment abordĂ©es ailleurs. Ainsi on aurait, si toutes les confĂ©rences Ă©quivalentes faisaient ce choix, des Ă©vĂ©nements avec leur identitĂ© propre et faisant que le public se dĂ©place pour profiter du contenu plus ou moins original. Miser sur les talents locaux rĂ©sous un autre problĂšme qui est que, au jour d’aujourd’hui, si on prend les plus grosses confĂ©rences (voire d’autres plus petites aussi), on retrouve les mĂȘmes intervenants. Constamment. Pire encore, on retrouve les mĂȘmes sujets mais Ă  des dates et lieux diffĂ©rents (vous vous rappelez quand je parlais de tournĂ©es ?). De fait quand bien mĂȘme ce serait qualitatif, le paysage dĂ©jĂ  saturĂ© ne va pas spĂ©cialement faire de place aux nouveaux venus qui veulent tenter l’aventure. Dit autrement, si ta boite au gros capital ne te paye pas pour te dĂ©placer partout pour faire des confĂ©rences racoleuses, tu pourras au mieux te contenter des meetups du coin. N’est pas le U2 du dev qui veut nan mais oh. Les Stades de France du logiciel ne sont pas pour les keupons du coin.

Mais le problĂšme du “tout local” est que des confĂ©rences peuvent ne pas faire le mĂȘme poids que d’autres. Elles pourraient se retrouver malgrĂ© elles trop spĂ©cialisĂ©es sur un domaine n’attirant pas assez de monde, ou alors en concurrence frontale avec d’autres spĂ©cialisĂ©es dans le mĂȘme sujet mais avec plus de moyens. Miser sur le “100% local ou presque” implique aussi que le public ait Ă  se dĂ©placer exprĂšs, ce qui peut parfois ĂȘtre bloquant lorsque l’on habite sur la cĂŽte mĂ©diterranĂ©enne et que l’on veut aller Ă  une confĂ©rence en Hauts-de-France ou dans le FinistĂšre. Pourquoi aller au CongrĂšs National de l’Oignon Rouge Ă  PlougasnouĂ«t alors que je peux aller au Salon National de l’Oignon Ă  Paname ?

Quand bien mĂȘme cela pourrait marcher, il faudrait avant tout que les entreprises du secteur s’investissent. Pour certaines ĂȘtre sponsor n’est pas envisageable (💾) ou implique des process particuliĂšrement complexes (đŸ€Ș), pour d’autres envoyer des collaborateurs animer des confĂ©rences ne reprĂ©sentent pas d’intĂ©rĂȘt ni de retour sur investissement (💾💾💾). Curieusement ce sont souvent les mĂȘmes qui se plaignent de ne pas rĂ©ussir Ă  recruter des talents ou Ă  les voir s’en aller vers de plus verts open spaces („ლ).

Bref, proposer du contenu trop local rendrait l’évĂšnement trop
 local, il faut savoir ce que l’on veut. Pour Libre en FĂȘte en TrĂ©gor 2018 on a pris ce paris, il a Ă©tĂ© rĂ©ussi. Plus de 700 personnes en une journĂ©e avec ateliers, stands et confĂ©rences, une belle rĂ©ussite :–) On a appliquĂ© la mĂȘme stratĂ©gie pour le CafĂ© Vie PrivĂ©e 2018 de Lannion : un bar bondĂ© avec une bonne quarantaine de personnes, des confĂ©rences d’acteurs du coin, et de vrais bons retours.

🏁 Et alors dans tout ça ?

Je voudrais dire qu’il faut rĂ©ussir Ă  faire le bon compromis.

Pas celui qui sĂ©curise un projet qui n’a mĂȘme plus besoin de l’ĂȘtre car il est bien rĂŽdĂ© et reconnu. Pas un compromis qui ne rĂ©pond qu’aux lois sacrĂ©es des bilans sur tableur, oĂč on doit attirer des tĂȘtes d’affiche et des grosses boĂźtes pour faire venir un maximum de spectateurs histoire de s’assurer d’avoir des bĂ©nĂ©fices Ă  5 chiffres đŸ€‘. Non. Clairement pas. Surtout pas quand on retrouve les mĂȘmes confĂ©rences partout alors qu’elles ont Ă©tĂ© enregistrĂ©es plusieurs fois et mises sur YouTube.

Il faut faire un compromis qui satisfait Ă  la fois les organisateurs et le public, et ce n’est pas facile. Avoir des speakers de renom va Ă©viter aux personnes de faire des dĂ©placements trop longs : on fait venir les speakers reconnus auprĂšs des gens pour qu’ils en profitent, et il faut le faire. Ce que l’on fait parfois dans nos meetups de GDG ou autres user groups peut ĂȘtre refait ici : on fait venir des bons intervenants de loin pour les gens du coin. En plus, ça sĂ©curise le projet et, ouf !, ça rassure.

Mais il faut aussi laisser leur chance aux autres. Je ne parle pas de laisser 10% des slots disponibles pour les “petits” avec des quickies de 15 minutes le midi lorsque tout le monde mange, quand les “grands” eux ont 90% des slots toute la journĂ©e. Non. PlutĂŽt faire du 50–50. Il ne faut pas confondre l’égalitĂ© devant le sacro-saint CFP et l’équitĂ© entre les intervenants n’ayant de base pas les mĂȘme chances ni la mĂȘme visibilitĂ©. Quand on organise une confĂ©rence on doit proposer du contenu intĂ©ressant d’abord, et flatter l’égo des uns et des autres ensuite. Pas l’inverse.

Ça peut ĂȘtre couillu et risquĂ©, mais il faut tenter. Les GDG et autres users groups servent Ă  ça aussi : faire connaitre et tester des intervenants du coin pour ensuite les propulser sur des Ă©vĂ©nements plus gros, ou Ă©changer entre eux des infos sur des speakers pas encore connus d’autres rĂ©gions mais qui peuvent faire de belles choses. Du cĂŽtĂ© du DevFest du Bout du Monde, on a rĂ©ussi Ă  avoir 25% d’intervenants de Bretagne, 42% si on compte ceux venant de Nantes (troll spotted?). Pour une premiĂšre c’est pas mal dĂ©jĂ . Mais le choix ne fut pas Ă©vident du tout, on s’est bien pris la tĂȘte, sachant aussi que l’on se refusait de mettre en avant des collĂšgues. On ne voulait pas avoir des commandos de nos entreprises respectives dans le programme.

Bref. Que l’on soit organisateur d’évĂ©nements ou pas, on retrouve souvent les mĂȘmes remarques : des speakers de renom qui ont rĂ©pondu prĂ©sents 👍, et parfois un manque de speakers peu connus qui pourtant peuvent proposer de belles choses 👎. Pourtant il y a moyen de corriger ça. Faut juste du courage et de la curiositĂ©, et prend des risques.

Toi qui rĂąles d’avoir les mĂȘmes noms dans les confs, j’espĂšre que tu comprendras mieux la problĂ©matique. Mais toi qui organises ces confs, j’espĂšre que tu comprendras le rĂ©el problĂšme.

— DerniĂšre mise Ă  jour : mardi 4 juin 2019 PrĂ©cĂ©demment sur Medium et paper.wf —

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