Kenavo l'asso
đ«đ· â vendredi 19 avril 2024
Mots clés : #AAEE, #ENSSAT, #associatif, #social, #fatigue
Depuis le temps, il faudrait peut ĂȘtre exorciser le truc pour passer Ă autre chose. Avec le temps, je me rends compte que la ressource la plus prĂ©cieuse que l'on ait est le temps justement. Temps qui, comme la fatigue, peut ĂȘtre notre ennemi. Et quand on fait de l'associatif, qui est vraiment important en soit si on s'y retrouve et que l'on a l'impression d'ĂȘtre utile, le temps et la fatigue peuvent jouer Ă©normĂ©ment.
J'ai obtenu mon diplĂŽme d'ingĂ©nieur âinformatique, multimĂ©dia et rĂ©seauxâ Ă l'ENSSAT, sur Lannion, Ă©cole d'ailleurs que je recommande tant pour son Ă©quipe Ă©ducative, les enseignements, les intervenants extĂ©rieurs, le programme et aussi la volontĂ© de toujours faire mieux. C'Ă©tait en 2015, et j'ai rejoint son association d'anciens Ă©lĂšves en 2016. Si c'Ă©tait Ă refaire, je le referais sans hĂ©siter.
L'ENSSAT est une âpetiteâ Ă©cole d'ingĂ©nieur, mais qui bouge et qui grossit. Son association d'anciens Ă©lĂšves, l'AAEE, est aussi de taille modeste. En effet, on est loin de ces trĂšs grandes Ă©coles corporatistes, usines Ă ingĂ©nieurs de salon gĂ©nĂ©ralistes, avec des rĂ©seaux d'anciens Ă©normes, qui parfois ont pour travers de maintenir le rĂ©seautage et l'entre-soit. En rejoignant l'association, j'avais envie de m'y investir, de faire des choses pour elle et pour l'Ă©cole, et aussi de travailler sur ça avec d'anciens Ă©lĂšves, d'anciens camarades, et si ce n'Ă©tait pas encore le cas, de bons potes. Mais 6 ans aprĂšs, il Ă©tait temps d'arrĂȘter, de suivre de loin et de soutenir comme je pouvais, car le temps disponible se faisait rare et l'Ă©nergie n'Ă©tait plus lĂ , alors autant ne pas s'acharner si on a fait sa part. Je n'aime pas l'idĂ©e de faire du job protection et de garder sa place au chaud ; si je ne sers Ă rien, je sors.
En soit, le bilan n'Ă©tait pas si mal. On a organisĂ© des Ă©vĂšnements comme des afterworks dans diffĂ©rentes villes, la traditionnelle rencontre annuelle entre Ă©tudiants et anciens, et aussi des brunchs. En plus de ça, du relai d'information aux diplĂŽmĂ©s, des discussions avec IESF, de la communication sur les rĂ©seaux sociaux et d'autres chantiers plus ou moins inachevĂ©s. Un autre projet important concernait la caisse de secours que l'on maintenait pour les Ă©tudiants en galĂšre, que ce soit pour avancer des frais ou parce que les fins de mois Ă©taient trop difficiles. Ăa fait se nouer le ventre, mais ça permet de garder les pieds sur terre. Au moins on en aura aidĂ© et sorti de la galĂšre.
Le sujet de cette caisse de secours Ă©tait Ă©pineux. D'une part des Ă©tudiants, une fois diplĂŽmĂ©s, et avec des situations correctes, malgrĂ© les relances, refusaient de rembourser les prĂȘts d'honneur qu'on leur avait octroyĂ©s pour les sortir de la merde. On s'est posĂ© la question de passer par un huissier ou une entreprise spĂ©cialisĂ©e, mais ça nous aurait coĂ»tĂ© encore plus d'argent sur un budget serrĂ©. Et d'autre part, des diplĂŽmĂ©s se permettaient de critiquer nos actions ; on se faisait reprocher d'aider des Ă©tudiants en galĂšre alors qu'on ne leur payait pas les premiers verres en afterworks, Ă eux (qui avaient une activitĂ© salariĂ©e). Peu importe l'Ă©cole, il y aura toujours de beaux connards.
Un autre sujet pĂ©nible Ă©tait le peu de retours sur nos afterworks. La chose est d'une simplicitĂ© dingue pourtant : chercher un bar, convenir d'une date, et venir. Pour ces Ă©vĂšnements, on a eu peu de monde par moment, et pour ceux qui ont bien marchĂ© il a fallu vraiment insister pour faire venir du monde. Pire encore, des lieux avaient Ă©tĂ© rĂ©servĂ©s pour un nombre de personnes ayant acceptĂ© de venir, et les entrĂ©es Ă©taient bien en dessous des chiffres prĂ©vus. Manque de respect et fatigue de voir que des adultes ne sont mĂȘme pas capables de tenir un engagement ou de prĂ©venir.
On nous a reprochĂ© de ne pas ĂȘtre visible sur les rĂ©seaux sociaux. Toujours preneurs de remarques et suggestions, on a amĂ©liorĂ© la chose : Twitter (pas encore X Ă l'Ă©poque), Instagram, Mastodon, une page publique LinkedIn et une refonte du groupe privĂ©. MĂȘme avec ces efforts, pas de retours, pas d'avis, pas d'abonnĂ©s. On avait mĂȘme mis en place un serveur Discord pour favoriser les Ă©changes et le partage d'information, et ça ne dĂ©colle toujours pas. Le bilan Ă©tait dĂ©cevant, et on ne comprend pas pourquoi ça n'a pas dĂ©collĂ©.
On avait aussi pas mal travaillé sur le partage des cours aux anciens diplÎmés afin de favoriser la diffusion des connaissances. Ce fut une belle galÚre ; entre les problématiques techniques de la plateforme à choisir et les réticences de certains enseignants, on n'avait finalement pas pu aller bien loin.
L'autre sujet le plus chaud concernait IESF. J'ai une particuliĂšre aversion pour les corporatismes de tous bords et de tous poils, qui se contentent d'exister et se tapent sur le ventre Ă la moindre occasion de rappeler qu'ils sont lĂ . Cette association Ă©tait pĂ©nible et le dialogue Ă©tait plus que compliquĂ© avec. En mĂȘme temps, les conseils d'administration de ventres bedonnants et de cheveux blancs semblent bien, bien loin de la rĂ©alitĂ© du terrain et du mĂ©tier d'ingĂ©nieur ainsi que des associations d'alumni qui ne sont pas assez grosses et prestigieuses pour eux. DĂ©jĂ , la cotisation Ă payer tous les ans Ă©tait exorbitante et reprĂ©sentait une partie Ă©norme de notre budget. Pourtant, les services disponibles en contre-parties ne nous Ă©taient d'aucune utilitĂ©. Peut-ĂȘtre que pour de grosses et vieilles associations parisiennes ils l'Ă©taient, mais pour le reste du pays non. MalgrĂ© des tractations pĂ©nibles ayant rĂ©ussi Ă leur arracher une rĂ©duction dĂ©risoire de 50 âŹ, l'adhĂ©sion Ă©tait Ă 500 ⏠par an. PrĂšs de la moitiĂ© de notre budget pour louer des salles sur Paris Ă prix rĂ©duits, bĂ©nĂ©ficier du service Labellis pour certifier via blockchains les diplĂŽmes, et inscrire les Ă©tudiants au Registre National des IngĂ©nieurs (RNI), chasse gardĂ©e d'IESF, c'est non. Car oui, mĂȘme si on a un diplĂŽme d'ingĂ©nieur, validĂ© par la CTI, on peut ne pas ĂȘtre dans ce RNI car une association poussiĂ©reuse fait du gate keeping. On a pourtant demandĂ© des mĂ©triques sur ces services : qui les utilisent, combien de requĂȘtes sont faĂźtes, quels types de rĂ©sultats, bref on voulait savoir dans quoi notre argent allait servir. On n'a jamais eu les chiffres demandĂ©s Ă part des approximations grossiĂšres au pifomĂštre. On nous affirmait que des milliers de requĂȘtes Ă©taient faĂźtes par mois sur le RNI ; un dĂ©bugueur de navigateur web nous montrait que la saisie de chaque caractĂšre dans le formulaire de recherche envoyait une requĂȘte. Autrement dit, si je saisis mon nom, j'envoie 10 requĂȘtes, de quoi donner des chiffres incroyables ! Outre le fait que l'autocomplĂ©tion n'est pas compatible avec l'ecoconception et n'est pas vraiment recommandĂ©e dans le RGESN, ce calcul grossier de mĂ©triques est ridicule. âIngĂ©nieurs et scientifiquesâ donc. Les prises de contact en direct n'aboutissaient pas, il fallait les chatouiller sur les rĂ©seaux sociaux pour susciter des rĂ©actions agacĂ©es, mais amenant quand mĂȘme la possibilitĂ© de discuter un peu. Ce ne fut pas utile in fine, mais bon, au moins leur responsable communication s'est donnĂ© la peine d'Ă©changer, merci Ă lui. On avait rĂ©ussi Ă remonter le fait qu'IESF Ă©tait trop franco-parisienne et exclusive, ce qui a menĂ© Ă une crĂ©ation maladroite d'entitĂ©s rĂ©gionales IESF, plus ou moins infĂ©odĂ©es Ă la structure principale, mais pas trop. Dit autrement, pour profiter de IESF Bretagne, il fallait adhĂ©rer Ă IESF Bretagne. Pour profiter d'IESF France, il fallait y adhĂ©rer aussi, donc double peine, double adhĂ©sion, encore plus de dĂ©penses. Et l'entitĂ© nationale ne soutenait pas d'une quelconque maniĂšre l'entitĂ© rĂ©gionale, pas la bretonne en tout cas. Bref, quand le budget d'une association est constituĂ© des dons et adhĂ©sions de ses membres, c'Ă©tait dur de justifier ce gaspillage de moyens pour des services rendus inutiles ou dont lâutilitĂ© n'Ă©tait pas dĂ©montrĂ©e. Ă la fin, on a finit par se faire exclure, n'ayant pas payĂ© notre derniĂšre cotisation. On nous avait mĂȘme dit que les temps Ă©taient durs pour eux aussi ; en mĂȘme temps quand on voyait les bilans en assemblĂ©es gĂ©nĂ©rales, il aurait Ă©tĂ© facile d'Ă©conomiser sur certaines rĂ©munĂ©rations, les cocktails et des services payĂ©s bien trop chers. Ils nous demandaient mĂȘme de payer pour avoir le rĂ©sultat des enquĂȘtes d'insertions des ingĂ©nieurs que nous avions nous-mĂȘmes relayĂ©s auprĂšs de nos diplĂŽmĂ©s ! Ă force de les secouer, nous avions enfin pu avoir un Ă©change entre le prĂ©sident de IESF et la prĂ©sidente de l'association de l'Ă©poque. Mais bon, ils nous auront vite oubliĂ©s je pense, Ă dĂ©faut d'avoir vraiment pensĂ© aux petites structures. C'est pas faute d'avoir tentĂ© de rejoindre le poste d'administrateur IESF sans succĂšs.
En plus de ça, les critiques des uns et des autres finissaient par ĂȘtre pĂ©nibles Ă encaisser. Entre les anciens qui critiquent sans s'investir ou comprendre, et les Ă©tudiants qui font de mĂȘme, dur de consolider la diaspora enssatienne et d'en faire quelque chose de chouette. Heureusement que l'on avait quand mĂȘme des anciens qui Ă©taient lĂ et savaient soutenir au besoin. On sait sur qui on peut compter.
On a eu aussi pour projet de valoriser certains profils de femmes ingĂ©nieures, ou encore de faire des tĂ©moignages de personnes Ă©tant dans de grands groupes, peut-ĂȘtre qu'en flattant les Ă©gos ça aurait marchĂ© : Saint Gobain, Ubisoft, ArkĂ©a, Cisco et SFR, Airbus Helicopters, Philips, ING, Sagem, VMWare, Decathlon, Google, STMicroelectronics et NXP, Enedis, Betclic, Huawei, Amadeus, Nokia, Microsoft, le CEA, NVIDIA, Oracle, mais aussi Ă l'Ă©poque Intel, Facebook, l'ArmĂ©e de l'Air et de l'Espace..... Bref il y avait moyen de faire quelque chose. Certains n'ont jamais rĂ©pondu ou voulu rĂ©pondre, et quand aux donnĂ©es rĂ©coltĂ©es et analysĂ©es, peu de personnes dans l'association ne voulaient les exploiter et contacter les anciens ayant rĂ©pondu.
Autre point de crispation, des divergences de point de vue avec certaines instances de l'Ă©cole. Jusque lĂ , on s'occupait de grossir l'association et de s'affairer Ă construire la diaspora enssatienne, en reprenant contact avec tout le monde. Mais avec le nouveau conseil de lâĂ©poque, il y avait trop de divergence. Les cheveux blancs du monde d'avant prĂ©fĂ©raient que ce soit l'association qui verse une cotisation Ă l'Ă©cole, sans forcĂ©ment rĂ©flĂ©chir aux consĂ©quences que ça avait, et la direction de l'Ă©cole prĂ©fĂ©rait s'aligner sur les autres Ă©tablissements en ne soutenant pas la cotisation Ă IESF.
Concernant les finances, on avait ponctuellement et marginalement du sponsoring d'entreprises locales notamment pour Ă©diter nos annuaires papiers. On a pu creuser le sujet aussi d'ĂȘtre reconnu d'intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral ou d'utilitĂ© publique, mais les associations d'anciens Ă©lĂšves ne sont pas compatibles avec ces critĂšres. Ainsi, pas de dons dĂ©fiscalisĂ©s possibles, donc peu d'entrĂ©es d'argent.
Et à ça s'ajoutent les autres crispations : peu de rĂ©ponses des diplĂŽmĂ©s, peu d'investissement d'une partie du conseil d'administration, concours de yakafokonsufide, des critiques de toutes parts... bref il fallait s'arrĂȘter.
Y'avait encore pas mal de choses Ă faire : faire des interviews des diplĂŽmĂ©s, chercher des faits marquants des anciens, se rapprocher d'entreprises pour leur parler de la taxe d'apprentissage, mettre Ă jour le site web, gĂ©rer le recouvrement de la caisse de secours, dynamiser l'annĂ©e avec des Ă©vĂšnements dans plusieurs villes... mais trop peu de moyens humains n'Ă©taient mis, mĂȘme pas un tiers du conseil d'administration Ă faire tourner la boutique, et faisant partie du reste des personnes actives, ça m'a usĂ© d'en faire autant avec si peu de copains.
C'est con, mais ça fait du bien de se vider la tĂȘte une derniĂšre fois pour ne plus y penser. Au moins j'ai gardĂ© de bons potes qui se reconnaitront, le noyau dur du conseil d'administration, les vieux schnocks. J'ai constatĂ© qu'avec d'autres membres du bureau il y avait trop de divergences de points de vue sur la façon de faire, autant partir plutĂŽt que de laisser les relations se dĂ©grader et finir fĂąchĂ©s.
On aurait pu faire tellement plus et bien mieux, mais bon, c'Ă©tait chouette quand mĂȘme. Bon courage Ă celles et ceux qui prendront la suite.
â DerniĂšre mise Ă jour : mardi 23 avril 2024 â
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