sans pudeur aucune
se dévêtir des lambeaux
— beauté sans écorce
l'arbre sait abandonner
les blessures des années
dans le miroir inutile
mon torse nu
ne montre rien
sous l'écorce une autre écorce
et bien d'autres encore
Phto pxhere.com licence CC0
partisans
ils viennent
porter des coups à la nuit
ils viennent
le pas certain
écarter les ronces
les branches tendues en travers
l’ancien sentier
qu'on pensait disparu
s'ouvre étroit
dans l'aube lente
libre passage
dans le jour trouble
on ne sait pas s'il pleut
grandes herbes penchées
sur la modeste flaque
qui a su capturer
de son œil dans la boue
un éclat de ciel bleu
Photo courtesy of Géraldine Geay
grands arbres
feuilles lentes
eau calme
à la surface du ciel
#photo #poésie
Photo jbm, licence CC0 domaine public
il n’y a pas de bout du monde
et quand bien même il en resterait
je n’irais pas le rejoindre
je ne veux parcourir
dans le jardin minuscule
que les trajets des fourmis
en leur file inlassable
parmi les prunes à terre
il n’y a pas de chant des sirènes
et même si soudain il s’élevait
je resterais sourd à leurs charmes
je ne veux entendre
sur le flanc de la colline
que le souffle du vent
à travers les hêtres
qui tanguent sous ses vagues
il n’y a pas d’amour toujours
me ferait-il signe malgré tout
que je lui rirais au nez
je ne veux aimer
au bord du fleuve endormi
que l’eau fraîche et amie
qui entoure mes chevilles
dans la douce étreinte du soir
l'éclat du soleil ouvre
dans la mer endormie
la voie éblouissante
qui monte vers le ciel
Photo ©Joël Mariteau, licence Creative Commons 4.0 – CC-BY-NC-SA.
#photo #poésie
Train de longue attente
(une allégorie facile)
le train de longue attente
rapidement s'allonge
on avance prudent
dans l'allée un peu étroite
surtout ne pas
déranger les gens
on hésite
d'un pas au suivant
à cause du léger roulis
on marche lentement
à cent soixante à l'heure
Les arrêts ne durent guère
on n'a pas le temps d'y penser
personne sur le quai encombré
n'attendait vraiment
bien avant d'arriver à destination
on s'est tout à fait endormi
pourquoi tout ce trajet
déjà on oublie
on laisse aller la nuit
pour maiwann
Indifférents aux rafales du vent furieux
qui mettent l'herbe en feu
Les rochers obstinés et confiants
attendent
Photo par @IanCykowski@photog.social, licence CC BY-NC-SA 4.0
la lumière captée par les troncs
trace à la craie blanche
le contour des rochers sombres
les minces branches et les ronces
frisent électriques et résistent
à l'ombre du soir
au plus obscur de nos jours
des filaments de vie
luttent contre la nuit qui vient
Photo par Gilles Le Corre
« fin de journée dans la forêt – 24 juin 2023 »
Courtesy of © Gilles Le Corre & ADAGP
#photo #poésie
le ciel mourant
veut emmener les nuages
dans son sillage
le fleuve au ralenti
dans l'estuaire du soir
rêve de flamber lui aussi
mais l'eau alanguie
se ternit de gris
déjà les rives sombres
gomment la lumière
seul un triste rose adouci
va tomber dans la nuit
quelle vie sourd encore
sous la vase du jour
comment croire à la puissante tempête
qui soulèverait les flots et les vents
bien au-dessus des ponts et des quais
bien au-dessus de la ligne noire
des forêts
Photo par Ian Cylkowski
Arnside, Cumbria, Summer, licence CC BY-NC-SA 4.0
#photo #poésie