UNE FICTION, évocation de la forêt. #erotica 07/10/2022

Le 4e jour du 10e mois, le soir, Elle m'a fait la surprise de me proposer 2 jours dans la forêt ensemble. Ce seraient nos premières vacances ensemble, rien que nous 2, depuis que nous nous sommes retrouvées et plus quittées. Elle avait réservé dans un ryokan, alors nous sommes parties tôt le matin du 5. On descend du train local 2h plus tard, dans une toute petite gare au pied des montagnes couvertes de forêts. En 5 minutes nous sommes au ryokan où on laisse nos sacs à dos, et nous partons, sous la pluie. La forêt est magnifique, tout de suite on est sous les arbres, le monde humain n'existe plus. On s'enfonce de plus en plus loin en suivant des sentiers de plus en plus minces… Au bout d'une heure je commence à percevoir les chuchotements. Elle, n'entend rien, que la pluie, le vent, les branches. On se parle peu, nos sentiments passent par nos mains unies. Deux heures (?) passent, nous nous arrêtons pour ouvrir nos bentos, pendant tout ce temps je n'ai cessé de percevoir les chuchotements qui peu à peu deviennent un chant comme atténué par la distance. Je n'entends pas avec mes oreilles, plutôt par mon ventre on dirait, ça n'est pas la première fois, je sais que ce sont les arbres qui murmurent. Et puis nous voici comme dans un cercle, au sol les fougères commencent à rougir, les grands sugis nous entourent, la pluie tombe droite au milieu de la clairière et le chant enfle,  m'étourdit, c'est le chant le plus puissant que j'aie jamais entendu, il me soulève, il me traverse le corps comme un courant et alors je commence à danser, je vole plutôt, mes pieds touchent à peine le sol, je veux entraîner ma compagne, qui me sourit d'un sourire comme je ne lui en ai jamais vu, son amour aussi me transperce, mais elle me repousse avec une forte douceur incroyable, non, c'est TA danse me dit elle, en insistant sur le TA. Je suis en larmes, mon cœur soudain s'est ouvert, la pluie et les larmes mêlées me lavent le visage, des larmes enfouies depuis des années sortent libérées comme un torrent en crue, avec elles partent, je le sens, ces choses noires, sales, gluantes qui étaient là, enfouies dans l'ombre, la joie m'inonde comme je n'aurai jamais cru possible et pendant ce temps le chant n'a pas cessé de gonfler, je ne suis plus moi-même, mon corps vibre, je m'appuie du dos au plus grand des sugis du cercle, je prends ma compagne par la main et l'attire tout près de moi.

Et je lui demande de me pénétrer.

Je suis devenue folle sans doute, je ne supporte pas cet acte. Mais Elle, avec une délicatesse infinie, tendrement, écarte mes lèvres et doucement commence à me caresser le vagin… … … … L'orgasme qui me saisit m'arrache des hurlements, mon corps est tendu de spasmes presque douloureux, Elle me couvre le visage de baisers. Lorsque je reprends conscience nous sommes accroupies au pied du grand sugi, le chant maintenant est un murmure apaisant, nous nous relevons en nous serrant l'une contre l'autre, en fait j'ai besoin qu'Elle m'aide à marcher, mes jambes par moment me trahissent. Des heures se sont écoulées, la nuit va venir, nous rentrons. En quittant la forêt nous nous sommes inclinées profondément comme en sortant d'un sanctuaire. La pluie n'a pas cessé de toute la journée, malgré nos vêtements de pluie nous sommes trempées, un bain chaud nous attend au ryôkan.

Elle m'a confié n'avoir pas « entendu » le chant des arbres mais senti « quelque chose » en elle, de puissant, de bienveillant, d'apaisant, qui l'invitait à me suivre et m'aider quoique je fasse.

Le lendemain la forêt nous accueille à nouveau, mais je ne perçois rien que le vent, les oiseaux, le bruit des gouttes et un grand sentiment de paix. Ce sentiment ne m'a pas quittée, je me suis réveillée ce matin le cœur vide de crainte et de colère, comme si toute violence en moi avait disparu, avait été lavée par les larmes, la pluie et l'amour.