silence sous le nuage
le combat a cessé dans la forêt profonde
les troncs s'entêtent encore vers le ciel bas
leurs branches inventent des oiseaux
depuis longtemps partis
Photo par Gilles Le Corre, « la forêt dans le brouillard, au sommet de la T. – 19 octobre 2023 » Courtesy of © Gilles Le Corre & ADAGP
les oiseaux sont partis ce matin
avec mille poussières dans les yeux je m'invente un nouveau jeu avec des jetons pour marquer la recette du point perdu
ce matin les oiseaux ont quitté la partie
sans pudeur aucune se dévêtir des lambeaux — beauté sans écorce
l'arbre sait abandonner les blessures des années
dans le miroir inutile mon torse nu ne montre rien
sous l'écorce une autre écorce et bien d'autres encore
Phto pxhere.com licence CC0
partisans
ils viennent porter des coups à la nuit
ils viennent le pas certain écarter les ronces les branches tendues en travers
l’ancien sentier qu'on pensait disparu s'ouvre étroit dans l'aube lente
libre passage dans le jour trouble
on ne sait pas s'il pleut
Photo courtesy of Géraldine Geay
il n’y a pas de bout du monde et quand bien même il en resterait je n’irais pas le rejoindre
je ne veux parcourir dans le jardin minuscule que les trajets des fourmis en leur file inlassable parmi les prunes à terre
il n’y a pas de chant des sirènes et même si soudain il s’élevait je resterais sourd à leurs charmes
je ne veux entendre sur le flanc de la colline que le souffle du vent à travers les hêtres qui tanguent sous ses vagues
il n’y a pas d’amour toujours me ferait-il signe malgré tout que je lui rirais au nez
je ne veux aimer au bord du fleuve endormi que l’eau fraîche et amie qui entoure mes chevilles dans la douce étreinte du soir
l'éclat du soleil ouvre
dans la mer endormie
la voie éblouissante
qui monte vers le ciel
Photo ©Joël Mariteau, licence Creative Commons 4.0 – CC-BY-NC-SA.
Train de longue attente (une allégorie facile)
le train de longue attente rapidement s'allonge
on avance prudent dans l'allée un peu étroite surtout ne pas déranger les gens
on hésite d'un pas au suivant à cause du léger roulis on marche lentement à cent soixante à l'heure
Les arrêts ne durent guère on n'a pas le temps d'y penser personne sur le quai encombré n'attendait vraiment
bien avant d'arriver à destination on s'est tout à fait endormi
pourquoi tout ce trajet déjà on oublie
on laisse aller la nuit