Unvarnished diary of a lill Japanese mouse

mamy

JOURNAL 11 novembre 2025

Ma grand-mère je ne vous ai jamais dit, mais j'ai rêvé d'elle la nuit dernière. Elle avait 19 ans en 1945, infirmière militaire à okinawa hontô, elle aurait dû mourir je ne serais pas née. Puis elle a préféré rester défendre ses blessés plutôt que se faire sauter et eux avec. Elle disait mon frère m'a raconté, qu’elle était là pour soigner pas pour tuer. Les Américains l'ont libérée à la fin de 1945. Elle est rentrée à tôkyô, plus de maison plus de famille, tous morts dans l'incendie. Elle a travaillé dans un dispensaire il y avait du boulot, c'est là qu'elle a rencontré son mari le futur père de ma maman. Il avait perdu un bras, il était bourré d'éclats, c’est l'un d'eux qui se baladait qui est entré dans son cœur 20 ans plus tard. Elle venait d'une grande famille, elle était la seule survivante, l'empereur lui a attribué une place à la cour, c’est comme ça qu’après leur fille a été mariée à mon père, autre grande famille. Elle me disait, j'étais toute petite mais je me souviens : « le Japon c’est pas un pays pour les filles » Et c’est toujours pas… #mamy


Me reviennent en cascade les trouvailles inventives sadiques et misogynes incroyables des mecs de la secte pour humilier et faire mal à la jeune femme que j'étais entre 16 et 18 ans. Ah ils savaient s'amuser. Je ne vais pas raconter ici, mais ils faisaient preuve de beaucoup d'ingéniosité. Y penser me fait mal encore aujourd'hui. Ça m'a même déclenché mes règles une semaine en avance. Là-bas, je n'avais plus de règles. Vous savez les mangas décrivent souvent la réalité, aussi dingue que ça puisse paraitre. J’ai des marques 15 ans après, mais il y a des choses qui ne laissent pas de marques juste des souvenirs douloureux. J'ai encore cependant une certaine fierté mal placée peut être, mais quand je revis ces scènes qui sont gravées dans cette mémoire que je croyais perdue, je sens que jamais pas une fois ils ne m'ont tiré une plainte ni un cri. Je serrais les dents à les briser mais pas un son. Mon frere m'avait imposé de ne jamais me plaindre, jamais pleurer dès 6 ans. Je tenais le coup. Pourtant ils s’acharnaient je vous garantis. Pour une fois qu’ils pouvaient s’amuser avec une petite aristo, c'était double fête ils m’appelaient la princesse. Pendant plus de trois ans j'ai tenu bon, tenu tête avec fierté et cette arrogance qui les mettait hors d'eux. Évadée trois fois, reprise deux. Je mettais un désordre inacceptable dans leur tranquille organisation esclavagiste jusqu'à ce qu'ils décident ma mort presque “naturelle” et j'ai survécu avant ma troisième et définitive évasion, j'ai connu quelques mois de relative tranquillité comme s'ils avaient été découragés, jusqu'à ce que je trompe une dernière fois leur vigilance. Et c'’était pour me suicider par le froid, leur rendre service en quelque sorte ! Les dieux en avaient décidé autrement. Je commence par la fin, vous voyez. Je ne suis pas pressée de remonter à l'origine de mes troubles, dont je vois bien l'ombre au loin, cachée dans les couloirs sombres de la maison familiale. Une chose à la fois, c’est déjà beaucoup.

#douleur

JOURNAL 13 novembre 2025

Mais pourquoi je me souviens de ma #mamy maintenant ? – vous avez bien une idée non ? La psy avait un grand sourire, elle me dit : Vous allez vite ralentissez un peu, vous allez vous faire du mal, mais si vous le supportez... vous avez un tempérament violent mais faites attention à vous. Ménagez vous.

Oui je sais. Ma grand-mère a été internée dans un camp de prisonniers, comme moi et elle est revenue je m'identifie à elle.


J'ai appelé mon frère. Il a les papiers de ma (notre) mamy Il n’a jamais regardé ces deux cahiers. Il va regarder s’il y a des choses qui pourraient me servir...


Dès mon arrivée dans la secte ça a commencé. C'était la nuit j'étais abrutie on m’avait droguée pour que je ne cause pas d'ennuis pendant le voyage. Au premier arrêt j’avais essayé de me sauver déjà et dans le bateau aussi. C’est une femme qui m'a accueillie. Elle ma forcée à me dévêtir, tout enlever, puis m'a poussée dans une salle de douche. C'était froid ça m'a salement réveillée. J'ai râlé. Alors elle m'a frappée direct avec une baguette, d'abord les jambes puis une pluie de coups. J'étais marquée de rouge. Elle m'a donné un samue gris genre celui des nonnes bouddhistes mais on ne m'a pas tondue. Quand mes cheveux dont devenus longs on me les a coupés sur la nuque. Pas de sous-vêtements, et au lit dans un placard sans lumière. Par terre un matelas très mince roulé et une couette encore plus mince, juste la place de dérouler le futon. Un petit éclat de lumière dans la porte, une ouverture pour me surveiller. Ma première nuit dans la secte je me suis endormie tard juste un peu avant qu'on me réveille et c'était mon premier jour. J'ai vu les autres filles vêtues pareil, on a eu un vague déjeuner sous la surveillance d’un type, interdit de parler. Un peu de riz dans beaucoup d'eau. Avec ça au boulot, ramasser le bois en bûches pour le refendre, je regardais déjà comment me sauver de là, en même temps j'étais sidérée de ce qui arrivait. Avec les filles on communiquait par signe, on chuchotait quand on pouvait le faire sans risque. J'étais la plus jeune, les autres entre 17 et 19 ans.

Plus tard le chef de la secte m'a expliqué que mon père m'avait mis là pour soigner mon exaltation et mes idées délirantes, que ça se passerait bien si j'étais docile et que je respectais les règles. Les règles, c'était simple : interdit interdit et interdit J'ai vite compris qu’ils avaient tous les droits sur moi et moi aucun sauf me taire et faire ce qu’on me disait sans hésiter. Il y a plein de sectes au Japon, parfois délirantes. La police laisse faire tant qu’il n’y a pas de scandale. Celle-ci était importante et très riche. Le village voisin en tirait un gros profit et donc personne ne trouvait à critiquer. Officiellement c'était une espèce de fondation pour soigner les troubles nerveux de filles envoyées par leur famille. On m'a dit qu’en France il n’y a pas si longtemps ça existait aussi géré par des bonnes sœurs, on y mettait des mineures “difficiles”.

#douleur

JOURNAL 14 novembre 2025

J'ai ouvert le paquet : deux cahiers. Au premier il manque les dernières pages et la couverture, Il est sur du papier jauni et fragile écrit au crayon de graphite, elle avait une belle écriture ma #mamy, elle avait eu des cours de calligraphie, pas comme moi. On sent la fille éduquée et cultivée il y a des caractères que je connais pas. La première page est datée 4 juillet 1945 #Okinawa. Il y a son identité. Elle était infirmière avec le grade de caporal. Engagée à 17 ans. Deux ans de formation. Elle en a 19. Elle était affectée à la 32e armée, celle qui s'est rendue le 22 juin je crois à la toute fin de la bataille.

Les premiers mots c'est :

« C’est affreux on nous a menti ça a tué des milliers de gens les Américains font la fête je m'occupe ici des blessés japonais et américains mêmes blessures mêmes souffrance ce sont des Américains qui m'ont recousu le front »

Il y a comme ça une trentaine de pages ça se termine en décembre 1945 comme ça : « On m'a annoncé ma libération je rentre à tôkyô demain personne ne m'attend. »

Le deuxième cahier est beaucoup plus récent. Il y a des notes personnelles sur ma famille... et sur moi entre 4 et 6 ans et la surprise c’est une petite photo sans doute prise à l'école, c’est une petite fille cheveux en bataille un peu coupés courts un regard plein de gentillesse mais en même temps on a impression elle regarde droit dans les yeux sans baisser le regard. Quatre ou cinq ans un uniforme un petit peu en désordre aussi. Oh là là c’est la seule photo de moi que j'ai vue de toute ma vie. Tu parles d’une surprise J’ai des larmes aux yeux c’est ma mamy qui l'avait gardée.

JOURNAL 16 novembre 2025 #mamy

J’ai lu et relu son journal de captivité de 1945. Elle avait 19 ans à la fin de la bataille d’Okinawa, dans l'extrême sud de l'île. Elle était infirmière caporal. Elle avait abrité 3 soldats blessés dans une grotte et une auxiliaire radio qui avait une jambe cassée, elle lui avait fait une attelle avec des morceaux de caisse et des bouts d'uniforme. La 32e armée dont elle faisait partie avait cessé le combat mais elles ne le savaient pas. On entendait encore des tirs et des explosions Elle n’avait plus de désinfectants, plus d´anesthésie, plus rien pour soigner ni pour manger. Puis alors qu'elle risquait un œil dehors un obus avait explosé un peu loin mais quelque chose l'avait touchée au front, elle avait le visage en sang. Son chef avant de l'abandonner lui avait laissé deux grenades pour se tuer et tuer les blessés. La radio qui avait le même âge et comprenait l'anglais avait capté des messages américains qui parlaient des prisonniers japonais, elle pensait que la propagande mentait, que les blessés n'étaient pas achevés et les prisonniers torturés comme on le leur disait depuis des années, alors ma mamy s'est dit qu’elle n’était pas là pour tuer ses blessés mais pour les sauver. Avec son sang elle a dessiné une croix rouge sur un bout de sous-vêtement blanc et l’a accroché à l'entrée de la grotte. Restait à attendre les Américains. Elles étaient à bout de force de toutes façons, rien à manger depuis des jours. Pour boire, l'eau qui coulait sur les parois, c'était tout, aussi pour calmer la fièvre des blessés. S’ils restaient sans soin ils allaient mourir.

C’est le lendemain après — on imagine la nuit d'angoisse — qu’elles entendent des voix. Elles vont vers l'entrée une soutenant l'autre et crient dans leur anglais maladroit hospital here wounded wounded don´t shoot us On leur dit de sortir doucement, un homme crie women women… Elles sortent dans la lumière c’est soit on les tue soit elles sont sauvées et les blessés aussi. Elle note que plus jamais de sa vie elle n'aura fait de paris plus jamais de jeu de hasard.

On ne les fusille pas, on les soigne, et on les envoie vers un poste de premier secours. C’est le premier choc pour elle. Elle était loyaliste et patriote engagée par fidélité à l'empereur, et d'un coup elle comprend que tous ces suicides étaient basés sur des mensonges, elle ne serait pas torturée, pas violée, pas humiliée, les Américains ne sont pas des bêtes fauves. C’est un monde qui s'effondre, une idéologie qui part en miettes. Tout le reste du journal est une réflexion sur le lavage de cerveau, la propagande comparés aux faits. On l'a soignée, nourrie, remise sur pied, et une fois en état on lui a demandé — pas ordonné — demandé d'aider à l'hôpital comme infirmière, et son professionnalisme était reconnu à l’égal de celui des Américaines et Américains . Elle a aidé à soigner les blessés des deux camps. C’est un médecin américain qui s'occupait de son front qui lui a offert le cahier.

Je me souviens d'elle avec toujours un bandeau autour de la tête, je sais pourquoi maintenant, c'était pour cacher sa cicatrice. Elle me manque terriblement ma mamy qui m’apprenait à écouter les arbres, qui me prenait sur les genoux et me faisait des câlins qui n'en finissaient pas. Avec ma maman la seule personne qui manifestait de l'intérêt pour cette petite fille seule.

Oh ma chérie, ma princesse, comme je te suis reconnaissante de me bercer dans tes bras quand je ne vais pas bien et en ce moment c'est souvent, comme ma maman ma mamy ma nanny, sans jamais t’impatienter sans compter ton temps, sans regarder l'heure.

Merci d'avoir lu jusqu'ici pour une fois je parle pas de moi excusez mes maladresses et mes fautes j'ai écrit sans brouillon en résumant le texte de ma mamy qui est bien mieux écrit dans le japonais élégant d'une jeune femme éduquée de la haute société des années 1930's 1940's

#mamy #guerre #okinawa