Unvarnished diary of a lill Japanese mouse

Les notes du laptop, par NEKO

JOURNAL DU LAPTOP Notre contrat d'union

Le vendredi 25e jour du 11e mois nous avions rendez-vous à la mairie de Tôkyô pour signer et enregistrer notre contrat d'union. C'est une simple formalité, pas une cérémonie, mais nous avions tenu à nous habiller chic, d'autant que mon frère aîné avait organisé une réunion familiale. A était en tailleur gris à jupe droite avec un chemisier très beau en soie crème, elle avait des talons hauts, oh comme elle était belle avec ses cheveux blonds dorés en queue de renard ! Moi j'avais mon kimono sakura bleu profond que j'avais acheté quand je vivais en France avec l'espoir le porter à notre mariage, tabi blanc et geta, nagajuban blanc, un obi ancien de ma maman que mon frère m'a donné, j'ai passé le temps qu'il fallait mais mon col était tiré juste comme il faut sur la nuque. Donc on entre dans le bureau, on était le 3e couple, le fonctionnaire nous donne les documents, on pose nos hanko, il me demande en riant si je suis de la famille de … – C'est mon frère Ça calme.

On ressort avec le papier, 5 minutes, c'est fini.

On repart, grosse auto noire genre celle qui m'avait transportée au Hokkaidô comme un paquet, mais c'est mon frère qui est à côté du conducteur, il parle il parle, lui qui n'est pas bavard…

On arrive à la maison familiale, tout le monde, frères et belles-sœurs nous accueille gaîment, il y a une prêtresse shintô, elle nous bénit et appelle sur nous la protection des kami, c'est tout ce qu'elle peut faire, le mariage shintô n'est pas prévu entre 2 femmes. Après ça on part tous en caravane de grosses autos noires vers un des plus chics hôtels de Tôkyô, peut-être le plus grand, je sais pas trop, où on a un banquet traditionnel dans un salon privé grand comme une gare. À la fin, mon frère nous fait un gentil speech, très attentionné pour A qu'il appelle sa sœur, et moi m'appelle sa grande petite sœur, j'ai cru qu'il allait pleurer, puis il nous donne une enveloppe, il la tend à A car elle est l’aînée de nous deux . C'est une sorte de test, car normalement on ne regarde pas tout de suite ce qu'il y a dans un cadeau, A le sait, elle prend l'enveloppe à deux mains, salue etc. comme il se doit, alors mon frère lui dit d'ouvrir tout de suite. Il y a des billets de train 1e classe et une réservation 3 jours dans un ryokan super chic avec onsen prés du fuji san. On remercie, on s'embrasse pas, ça se fait pas, mais on remercie beaucoup, tout le monde est très ému. Ensuite on nous conduit au train, c'est la fin de la journée. Les 1ères classes au japon c'est une expérience, les trains sont chers ici, mais le service est très au-dessus de ce qu'on peut imaginer en France. Les fauteuils tournent dans le sens qu'on veut, tout est propre autant dehors que dedans, il y a des services de bar etc.

Tout ça c'est beaucoup d'argent, bien plus que ce que on peut, nous deux, dépenser, et ça me gêne beaucoup beaucoup, parce que je veux pas jouer les pauvres petites filles riches, je ne suis pas riche, j'ai renoncé à ma part d'héritage, je ne veux pas de cet argent salement gagné depuis des siècles sur le dos de travailleurs surexploités. Je suis donc mise en contradiction avec moi-même en acceptant ces cadeaux hyper luxueux. On en a parlé toutes les deux, beaucoup. Si vous avez lu les chapitres précédents de ce journal, vous savez par quoi je suis passée depuis la mort de maman j'avais six ans et ce que on m'a fait subir surtout entre douze et dix-huit ans, ce qui motive mon rejet de la puissance et de l'héritage familial. Mon frère aîné, maintenant le chef de la famille, a découvert tout ça après la mort de notre père et il en a développé un terrible sentiment de culpabilité et de honte. Il sait bien que l'affection entre nous c'est quelque chose bien difficile à faire naître, avec ce passé, et il essaie de rattraper comme il peut. C'est pour ça que j'accepte ses cadeaux : c'est sa façon de diminuer sa honte, qui est sincère, je sais que il a été manipulé, comme mes deux autres frères, et je veux pas les faire souffrir plus. Ça me gêne, mais tant pis, il faut que je mette ma fierté et mes beaux principes de côté parce que je peux pas refuser leur désir de rattraper les fautes du passé, ce serait cruel et aussi injuste que ce que j'ai moi-même subi de cruauté et d'injustice.

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JOURNAL DU LAPTOP Notre contrat d'union (suite)

Lune de miel dans un ryokan des montagnes

Nous arrivons à la gare, une auto nous attend, le chauffeur vient directement vers nous, on lui avait précisé qu’une des deux voyageuses était blonde… Accueil traditionnel dans ce ryokan à l'ancienne mais grand luxe, oh là là j'avais jamais vu ça. C'est magnifique, notre chambre est immense avec une pièce d'entrée, on a l'impression que les tatamis sont neufs, il y a un bain privé avec une fenêtre sur la montagne, on se change, les yukatas et haoris sont très beaux, bien sûr très propres, neufs peut-être ? Ils sentent le neuf en tout cas, comme les futons d'ailleurs. Il fait nuit, on va directement prendre un bain dans le onsen extérieur, de là on voit le fuji san, c'est extraordinaire. Le personnel est charmant, de jeunes femmes adorables, incroyablement gentilles et attentives, tout en étant très libres avec nous, peut être parce que nous sommes deux femmes, je ne sais pas. C'est agréable que mon nom ne semble pas du tout les coincer comme c'est souvent le cas, je me dis qu’elles doivent en voir d'autres, évidemment, cet endroit est fréquenté par la haute société, les célébrités etc. Mon frère ne s'est pas moqué de nous… C'est extraordinaire d’avoir un bain la nuit, sous un abri ouvert des 4 côtés, face au fuji san, l'eau est très chaude mais ça va, on se caresse, forcément c'est trop tentant, on s'amuse comme deux petites filles… Quand on sort de l'eau on est reposées, toutes molles même, c'est super agréable. Le lendemain on a carrément fait l'amour dans l'eau, on était toutes seules, on a profité, et tant pis s'il était arrivé quelqu’un. C'est notre voyage de presque noces après tout. On ne fait pas que se baigner dans un ryokan, on y mange aussi ; là, on s'est goinfrées d'anguilles sauvages, la saison de pêche commence au 11e mois, préparées de toutes sortes de façons, oh là là quel régal, et le riz je ne sais pas d'où il vient mais il est particulièrement parfumé, bref, vous devinez qu’on était bien traitées. Deux geishas sont venues nous tenir compagnie, jeunes, dans nos âges, spécialement jolies, elles dansent et jouent du shamisen, de vraies artistes, on a discuté et bu du saké ensemble, elles ont commencé leur apprentissage vers seize ans, ce qui fait qu’elles étaient geishas depuis cinq ou six ans, et cinq ans de formation elles nous expliquent que c'est une vocation, il faut en vouloir, c'est très dur.

Ce ryokan est très ancien, construit dans la montagne, pratiquement au milieu des forêts, cèdres, sugis, érables aussi sur un versant. On a pu faire de longues balades il ne faisait pas froid du tout pour ce mois d'automne, mais les érables sont déjà rouges, et plus d'insectes. On nous a dit qu'il y a beaucoup de papillons, quand les premières nuits froides arrivent, ils rentrent dans les pièces alors on est obligé de mettre des filets aux fenêtres, comme des moustiquaires en fait. À la saison des érables rouges, les touristes arrivent pour les contempler et on décore les portes avec des branches. La semaine suivant notre séjour tout l'hôtel est réservé ! À sept jours prés on ne pouvait pas venir. On a eu aussi deux séances de massage, par une masseuse extraordinaire, pas aveugle comme dans le temps, pas très jolie non plus faut bien dire, cinquante ans peut-être mais quelle professionnelle ! Après la séance on a l'impression qu’on nous a démontée pièce par pièce, morceau par morceau, mais remontée mieux qu'avant. C'est extra. Et vachement érotique de regarder et de subir. Honnêtement j'avoue que mon sexe était mouillé à la fin, alors que pas un geste déplacé, mais se faire manipuler comme ça c'est super excitant pour moi en tout cas, j'adore me laisser faire.

Je ne vais pas raconter ce que font deux amoureuses quand elles ne mangent pas, ne boivent pas du saké en compagnie, ne prennent pas de bain, ne se font pas masser et ne se baladent pas en forêt. Vous devez bien vous en douter et je confirme qu’on n’a pas perdu une minute. Le chauffeur nous a ramenées à la gare le lundi soir, il était sidéré de voir comment A parle bien japonais, c'est la première fois qu'il entend une occidentale capable de dire plus de trois mots.

Sayônara fuji san, ou plutôt mata itsuka (« adieu Seigneur Fuji, ou plutôt au revoir »)

Retour par le même train, juste personne ne nous attendait à l'arrivée, on était presque étonnées, on s'habitue au luxe très vite, mais attention, vous m'aurez pas comme ça !

Le journal est à suivre, mais c'est fini pour la lune de miel…

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JOURNAL DU LAPTOP

Je vais parler de mon frère aîné

Mes trois frères ont été élevés dans une morale de fer par un père tyrannique, le prototype du patriarcat, machiste, viriliste, misogyne, brutal et fasciste. Ils ont ainsi appris avec ça à mépriser et brutaliser leur petite sœur. Ils m'ont terrorisée jusqu’à ce que je quitte définitivement la maison vers douze ans. Mon frère aîné s'est mis dans la tête de m'entraîner aux techniques de combat traditionnelles quand j'ai eu six ans, à la mort de maman, comme il faisait avec les deux autres frères. Ensuite je l’ai déjà raconté, les abus sexuels par mon oncle, les viols filmés pour loliporns, l'enfermement dans une secte, mes évasions, ma liberté, mon départ pour la France etc. Pendant tout ce temps la version officielle servie à mes frères était que j'étais folle et que on me soignait à la montagne. Il y a un deux ans notre père est tombé malade, puis il est mort. J'ai d'abord renoncé à ma part d'héritage, et par bravade j'ai eu ce duel au bokken avec mon frère, et je l'ai battu, ce qui a été pour lui un ébranlement considérable alors qu’il était déjà troublé car son épouse, qui ne s'entendant pas avec le père, l'avait mise en garde contre beaucoup de choses qui lui semblant suspectes. Voilà pour résumer la situation de départ.

Et alors mon frère a pris la succession de notre père et il a petit à petit trié les archives personnelles. Ce qu’il a découvert a bouleversé sa vie, a remis en question tous ses fondements, tout ce que il croyait vrai. Notre père à la morale si stricte aimait les petites filles, comme son frère. Il existe un carnet avec les âges, les dates, les noms, les prix. Il a consommé pendant des années des filles de l'âge de la sienne. Une explication de sa haine à mon égard ? Mon frère a découvert avec horreur ce qu’on m'avait fait, mon père allant jusqu'à monnayer mes viols, puis voulant littéralement ma mort au hokkaidô. Et il a commencé à développer un culpabilité énorme, se considérant complice de tout, et ça depuis ma petite enfance. Il a un désir brûlant de réparer ce qui peut être réparé mais ne sait pas comment. Il essaye à sa façon de me faire plaisir, il y arrive le mieux en honorant ma chérie par exemple. Certaines de ses attentions m'embarrassent mais je n'ai pas le cœur de les refuser, je ne veux pas augmenter sa souffrance car c'est un homme très droit et sa souffrance est réelle. Ne pouvant avoir d'enfant le couple en a adopté deux, je l'incite à reporter sur eux tout l'amour et l'attention qu'il regrette de ne pas m'avoir donné. Je me sentirais en retour coupable s'il n'arrivait pas à apaiser sa conscience. Je crois qu'il consulte un médecin, il a de gros problèmes de sommeil aussi. Je ne veux plus me venger de mes frères car je sais maintenant à quel point ils ont été manipulés par un pervers. Dans cette histoire, en fait, de manière différente il y a plus que des victimes, c'est un gâchis affreux, il nous reste bâtir ensemble de nouvelles relations, pas oublier le passé mais admettre qu’il a été ainsi, que nous n’y pouvons plus rien et essayer d'avoir un avenir commun qui ne soit pas alourdi ou enchaîné par lui. Merci si vous avez lu jusque-là, pardonnez-moi de raconter ces choses pénibles mais les écrire et qu’elles soient lues me permet de leur donner un sens. En faisant qu’elles deviennent UNE histoire, elles cessent de n’être que MON histoire.

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Journal 11 décembre 2022

J’aime pas cette vie de salarywoman, ça me va pas métro métro laptop métro. Je rêve de forêts, de rivières, de rochers et de bêtes sauvages, elles hantent mes nuits, je me réveille je sens l'odeur. L’odeur de la terre, des arbres sous la pluie, l’odeur des grands sugis dans le vent, l'odeur de fauve des petits cerfs, encore l’odeur de l'ours qui m'obsède, cet ours qui revient sans cesse dans mes nuits en ce moment, sans cesse son regard comme un reproche « que fais-tu là » et je ne sais rien répondre… La seule belle chose c’est l’amour partagé, la seule chose qui me fait que ma vie m'intéresse. Oh A, je t'aime, aime-moi fort fort, tiens-moi debout sinon je tomberai à nouveau.

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Journal du laptop

Je disais que je ne voulais plus raconter que de jolies histoires et ne parler que d’amour et puis sans prévenir le passé me revient en pleine figure.

Ce soir-là, il y a pas longtemps, j’avais eu une grande conversation avec mon frère qui m’avait raconté les saletés de notre père, alors avec A on traînait un peu dans un bar à bières, en se détendant parce que ça avait été un peu dur d’apprendre tout ça, et puis voilà un type pas mal bourré qui arrive et qui me dit sans prévenir qu’il me reconnaît, m’a vue dans une vidéo et il me trouve super bandante et il la regarde tout le temps. J’ai eu un trou noir et je me suis reprise… J’avais sorti mon tanto, mon frère a arrêté mon bras à peine à un centimètre de la gorge du type, blanc comme un mort. Il a dû se passer une demi-seconde entre le retour du traumatisme et les réflexes qu’on m’a inscrits profondément entre 6 et 12 ans, j’avais manqué tuer ce type, à coup sûr, sans même y penser. Je me suis fait engueuler par mon frère (c’est lui quand même qui m’a appris à me battre) par A, par Cat et G quand ils ont su, alors depuis j’ai confié mon tanto à la garde de A, je ne le porte plus.

C’est juste pour rappeler :

Les vidéos porno japonaises ce n’est pas toujours du chiqué, surtout de toutes façons quand on met en scène des très jeunes femmes. Moi j’avais pas encore 15 ans la première fois qu’ils m’ont violée. Regardez pas ça.

Les traumatismes, ils restent même si on les croit en sommeil

Quand je dis que j’ai peur des démons qui dorment encore au fond de moi, c’est pas de la blague, c’est des vrais démons dangereux.

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#JournalDuLaptop Je démissionne

23 janvier 2023

Partie ce matin vers 7 am je retrouve A à 7 pm, j'ai passé 4 heures de ma vie dans le train ou le métro. Des millions de gens vivent comme ça, moi je ne veux pas. Je veux vivre jusqu'à la mort, pas perdre ma vie et mourir petit à petit chaque jour un peu pour le profit de quelques-uns qui vivent comme ils veulent grâce à la mort progressive de leurs employés. Ça va, moi je veux vivre ma vie et c'est tout, on m'en a volé un trop gros bout déjà, je ne vais pas perde davantage I quit. Je démissionne.

24 janvier 2023 Je suis sur mon vélo et je respire l'air de la mer et des arbres. C'est autre chose que l'air du métro. Je me marre en pensant à la tête de mes patrons.

Je suis fatiguée, la bagarre pour se faire accepter en femme libre est difficile, quitter un job « comme ça » ça passe mal et ça demande vachement d'énergie, alors je vais dormir enfin j’espère. Heureusement je ne suis pas seule, il y a ma compagne ma souveraine mon amour A et mes amis de France.

Je me suis évadée

JOURNAL 25 janvier 2023

Voilà, j'ai démissionné, c'est fait, c'est fini. Comme un poids qu'on aurait ôté de mon dos. Je devenais bossue. Je vais pouvoir me redresser et regarder le ciel, le sommet des arbres. Du côté de l'argent nous avons très peu de besoins, les livres, des vêtements un peu, la nourriture et les factures, des choses comme ça et A gagne assez pour nous deux dans ce cas.

Alors comment ça s'est passé ?

Mon boss hollandais a cru d'abord que je voulais être mieux payée etc. il était ok pour m'augmenter, difficile de lui faire comprendre que la vie qu'il me faisait mener me plaisait pas, alors il met tout ça sur le compte du caprice de l'enfant gâtée par une famille complaisante, tu parles, et parce que les Japonaises sont difficiles à comprendre parfois et il est furieux naturellement, je lui complique sa vie je sème le bordel dans les projets, etc. Les Japonais ne comprennent pas non plus, quitter un super boulot, refuser des responsabilités croissantes, se moquer des compliments… tout ça les dépasse, c'est anti-social. Ils sont persuadés que c'est à cause d'une secte, en même temps les sectes ont pas la cote en ce moment, en même temps on n’ose trop rien dire, j'explique que ma vie c'est pas le métro etc. ils ne comprennent pas, ils font semblant, ils font les Japonais, eeee eee nnnn nnnn mmm mmmm mais ils comprennent pas. Évidemment eux aussi sont furieux, mais ils le disent pas, ils sont emmerdés, les Japonais n’aiment pas ce qui sort des rails, ce qui bouscule le plan, ils sont furieux de perdre une sale gamine, une emmerdeuse, une râleuse oui, mais qui parle 3 langues pour le prix d'une. Leur plan avec les Belges ça va être compliqué, ça va leur coûter des yens… Un qui est content, il me l'a dit en douce, c'est le nouveau traducteur d'anglais, du coup il va passer à un temps complet, il est augmenté, il va pouvoir se marier ! Ah Ah Ah !

Aux yeux de tout le monde je passe d'un côté pour une fille de famille riche et capricieuse qui n'a pas besoin de travailler, de l'autre pour une dingue illuminée par une secte de retour à la nature et aux petits oiseaux, bon, ça va, je m'en tape.

Mon frère non plus n'est pas trop content, il sent que je vais m'échapper encore un coup pour aller personne ne sait où même pas moi, je crois qu’il craint que je ne sois dingue aussi, en douce il essaye de se renseigner avec A, je ne sais pas si elle arrive à le rassurer vraiment. Je ne sais pas ce que pense ma belle-sœur aînée, on doit se voir dans le week-end (28 ou 29 janvier)…

Va faire comprendre à tous ces gens inscrit dans un ordre social ou un emploi et encore mieux des responsabilités c'est réussir sa vie que j'étais bien plus heureuse quand je ramassais les olives ou quand je faisais aide-bûcheron en France, parce que le truc principal c'est que ma vie est dans la nature, pas dans les villes à métro, dans les journées de train ? Va faire comprendre que je préfère le chant des arbres et le murmure des pierres aux bavardages des réunions de travail qui n'en finissent pas et qui se terminent en nomikai. Que je préfère le vent sur ma peau, entre mes cuisses, à porter des collants sous la jupe parce que c'est la tenue professionnelle obligatoire, encore j'ai réussi à éviter les talons hauts parce que heureusement le milieu des éditions manga c'est moins strict. Mais ils ne se rendent pas compte que regarder le ciel une fois dans l'année pour hanabi ou pour hanami c'est pas assez pour dire on vit, que la vie sans beauté sans poésie c'est la marche à la mort la tête dans un sac, moi je veux marcher à la mort les yeux ouverts, les poumons libres de se remplir de l'air vivant du monde, pas de l'air conditionné, filtré emprisonné comme l'air du Fujisan vendu en boîte ! Que vivre en colère de frustration jusqu’à ne pas dormir la nuit, c'est pas ça du tout vivre, merde merde merde.

Je suis libre, une nouvelle fois, je me suis évadée une nouvelle fois, et d'une prison que j'avais moi-même accepté de me construire autour, que je n’ai pas vu s'élever parce qu’elle est montée par petits morceaux, brique par brique, sans bruit.

Alors ne vous faites pas de souci pour moi, la liberté c'est mon oxygène je ne peux pas vivre longtemps sans, comme un poisson sorti de l'eau je finis par étouffer. Voilà, je respire à nouveau librement, je peux courir sauter sans m’essouffler, aimer complètement la femme qui m'accepte comme je suis, que j'aime et je remercie infiniment pour la patience et l'amour qu’elle me donne.

JOURNAL 26 janvier 2023

Je suis partie tôt ce matin en forêt, j’ai passé toute la journée sous les arbres à écouter, me suis même pas aperçue qu’il fait froid. Les arbres aussi me disent que j’ai raison. Ma sœur aînée, l'épouse de mon frère, pense elle aussi que j'ai raison, il faut vivre selon sa nature si on veut vivre, elle me dit. A travaille, une activité qui la passionne, si elle n’est plus passionnée elle arrête tout de suite aussi. Autre chose : on se marie à l'ambassade à la fin de février. On va publier les bans.

Aujourd’hui je n’ai pas ouvert mon laptop, vous savez c'est la première fois depuis je ne sais pas combien d’années que ça arrive, pendant les jours de travail ? Je ne réalise pas encore que je suis totalement libre là, je vais essayer de bien en profiter, on n’a pas besoin de plus d'argent que ce que A gagne, même si c’est pas beaucoup (c’est pas mieux payé qu’en France les chercheurs, si c’est pas en informatique ). On a assez pour le moment alors A me dit de profiter, elle aime mieux me voir comme ça qu’en colère...

JOURNAL 7 février 2023

Quelques idées venues après mon cauchemar le plus récent, c’était la nuit du vendredi 3 février 2023. Mes cauchemars c’est toujours le même scénario, j’en ai déjà parlé je ne raconte pas à nouveau. Le réveil c’est terrible parce que je continue le scénario, je suis à nouveau la petite fille de même pas 15 ans, ou un peu plus âgée, 16 ou 18, tout mon corps me fait mal, je tremble de rage et d’humiliation, je suis trempée de sueur, sale, puante, mes dents claquent, je ne sais plus où je suis. A me serre dans ses bras, fort fort, jusque je ne tremble plus, elle me berce, m’appelle par le petit nom russe qu’elle me donne et que j’aime, elle fredonne des chansons douces, elle me garde comme ça jusqu’à ce que je sois capable de dire mon nom, mon âge, la date du jour et l’endroit où on se trouve, ça peut durer plus de une heure…

C’est fragile une petite fille, j’ai déjà dit mais je répète : une fois qu’on l’a bien cassée, éparpillée les morceaux c’est long à réparer et si parfois on croit que ça y est, boum il y a des rechutes.

Et il y a une espèce d’hommes qui aime à casser les choses fragiles. Vous n’avez jamais vu dans les bois, près des chemins, toujours, là où c’est facile d’aller, on a piétiné les champignons, ou alors les fleurs ? Plus les choses sont gracieuses et inoffensives plus on dirait on s’est acharné dessus, pourquoi les coups de pied dans la mousse et pas dans les rochers ? Eh, pardi, ça fait mal. Pourquoi la petite fille et pas le grand type ? pareil. Le fragile champignon, la pomme de pin, le sexe tendre et nu, ce visage étonné qu’on gifle, ce sein petit qu’on tord, tout ça aucun risque. Elle se défend la petite garce ? À 5 hommes on arrive à la maîtriser, c’est juste plus rigolo que les champignons qui se défendent même pas, aussi amusant que mutiler le chaton trop faible pour opposer une résistance notable ou pour fuir.

— Tu exagères quand même de comparer des violeurs et des piétineurs de champignons… — Non je n’exagère pas, si la fragilité ne t’inspire aucun sentiment de tendresse, si la beauté ne t’inspire pas de respect, si détruire et salir ce qui est innocent t’amuse ou t’excite ou simplement ne te dégoûte pas alors champignon ou petite fille c’est pareil on a tout à redouter de toi.

— Tu dis ça parce que tu n’aimes pas les hommes — C’est faux. Je n’aime pas la brutalité, je n’aime pas le désir de domination, je n’aime pas le goût d’humilier, de rabaisser, je n’aime pas non plus la volonté de pouvoir et de possession, la cruauté pour tout dire, de certains hommes, je n’ai pas de comptes à régler avec la moitié mâle de l’humanité et mon homosexualité n’a rien à voir avec ça, j’étais homosexuelle avant d’avoir à faire avec la perversité de certains hommes même si je ne l’ai découvert qu’après en avoir été victime.

Je parle de mon expérience mais ça n’est pas parce que c’est MON expérience c’est parce que c’est UNE expérience et une façon de la vivre, que je suis certainement pas la seule à la vivre et donc je ne parle pas de MOI mais de l’intérieur d’une victime comme une autre et c’est comme ça que je vous prie de prendre ce texte. Je sais que d’autres femmes ont écrit et bien mieux que moi des expériences vécues différemment, c’est l’ensemble de tous ces témoignages qu’il faut considérer, pas ce qui fait les particularités de chacune de nous. On voit toutes différemment mais une chose est sûre c’est qu’on a été victimes du même état d’esprit.


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